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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

RESSOURCES HUMAINES

21 Juin 2025 , Rédigé par FO Services Publics 51

La proposition de verser des acomptes sur salaire critiquée dans la fonction publique

Le député Renaissance Jean Laussucq vient de déposer une proposition de loi pour faciliter le versement d'acomptes sur salaire aux salariés du privé comme aux agents publics. Une piste qui ne fait pas l’unanimité au sein de la fonction publique. Pour les syndicats, elle ne règle pas la problématique des salaires.

Et si le salaire versé à la fin du mois n’était bientôt plus la norme, dans le secteur privé comme dans la fonction publique ? Le député Renaissance Jean Laussucq vient de déposer une proposition de loi relative aux acomptes sur salaire, “visant à assurer plus de souplesse aux salariés et aux agents publics dans la perception de leur rémunération”. Un texte qui a pour but d’assouplir les conditions dans lesquelles un salarié ou un agent peut percevoir une partie de sa rémunération avant la fin du mois, contrairement à la règle actuelle.

“Il est essentiel de garantir aux salariés une plus grande flexibilité dans la gestion de leurs ressources financières”, explique le parlementaire dans l’exposé des motifs de sa proposition de loi, qui entend “apporter une réponse concrète [aux] difficultés” et dépenses auxquelles certains travailleurs doivent faire face en cours et en fin de mois.

Dans les faits, le droit actuel autorise déjà les acomptes sur salaire, c’est-à-dire à la perception d’une partie du salaire déjà gagnée et due par l’employeur sans attendre la fin du mois. Ce droit est néanmoins limité au seul secteur privé. Le code du travail prévoit d’ailleurs uniquement le versement en une seule fois de 50 % du salaire à la moitié du mois. Dans la fonction publique, ce droit à l’acompte salarial n’est régi par aucun texte. Il ne peut être accordé qu’à la discrétion des employeurs publics.

“Bon vouloir de l’employeur”

L’octroi d’acomptes “demeure donc souvent soumis au bon vouloir de l’employeur sans cadre réglementaire clair”, regrette Jean Lassucq. Une situation qui, selon lui, “peut créer des inégalités” entre travailleurs. Pour leur “offrir plus de souplesse financière”, le député compte ainsi permettre aux salariés de percevoir plusieurs acomptes sur salaire au cours de mois.

À savoir, 5 acomptes maximum et non plus un seul comme aujourd’hui, le tout, toujours, dans la limite de 50 % du salaire mensuel. Un droit qu’il compte étendre aux agents publics (fonctionnaires comme contractuels) afin, notamment, de contribuer au “renforcement de l’attractivité de la fonction publique”.

Selon le scénario du député, la demande des travailleurs n’aurait pas à être justifiée. Sa proposition de loi prévoit en effet de renvoyer à un décret les modalités d’encadrement du refus d’un acompte. Un décret qui, selon lui, devrait préciser “les motifs légitimes pour lesquels un employeur pourrait s’opposer à une telle demande”, par exemple “en cas de difficultés de trésorerie avérées”.

Si l’ambition de ce texte est partagée par une partie de la droite, rien ne dit encore si cette proposition de loi sera rapidement examinée par l’Assemblée nationale. “Le calendrier législatif étant très contraint jusqu’en juillet, ce sera un sujet que nous remettrons sur la table pour une inscription à l’ordre du jour”, explique-t-on dans l’entourage de Jean Laussucq. La proposition du député ne manque en tout cas pas de susciter le débat au sein de la fonction publique, et notamment chez les syndicats, qui voient une fausse bonne idée dans cet assouplissement des conditions de versement d’acomptes sur salaire. Cela ne règlera la problématique des rémunérations des agents publics, tonnent-ils en cœur.

“Réponse à côté de la plaque”

“Que l’on ouvre cette possibilité peut aider ponctuellement un agent, mais la mesure ne peut pas remplacer une politique salariale cohérente et une révision des grilles”, explique ainsi Luc Farré de l’UNSA. “L’idée de base peut sembler bonne et aller dans un sens pouvant potentiellement aider les agents à éviter le surendettement”, abonde Pascal Kessler de la FA-FP. Mais, ajoute-t-il, “la vraie solution, c’est d’augmenter le pouvoir d’achat des agents en augmentant la valeur du point d’indice et en redonnant du sens aux carrières et aux grilles”.

Pour Caroline Chevé de la FSU, la proposition du député Jean Laussucq “est avant tout la preuve qu’il y a bien un problème sérieux avec les salaires dans le public comme dans le privé”. “La réponse est à côté de la plaque ”, estime-t-elle, tout comme Christian Grolier de Force ouvrière, qui dénonce une proposition de loi “scandaleuse” qui “confirme” et “entérine” un pouvoir d’achat “insuffisant”. Le texte “ne résout rien et ne fera qu’accentuer les difficultés de tous les mois car les agents n’auront pas davantage de revenus”, ajoute le syndicaliste. “Et vu les pertes de pouvoir d’achat, il est à craindre que le versement d’avances, qui sera une bonne chose et une aide ponctuelle fort utile pour certains, se traduise pour d’autres par une course en avant vers le surendettement “, renchérit Mylène Jacquot de la CFDT.

Le scepticisme est également de mise chez les employeurs publics, et notamment chez les élus locaux, où l’on pointe un risque de complexification de la gestion RH. “Il faut veiller à simplifier sans surcharger”, affirme Murielle Fabre, la secrétaire générale de l’Association des maires de France (AMF). “Plus de possibilités d’acomptes, c’est aussi plus de mandatement et donc plus de coûts “, ajoute la maire de Lampertheim, dans le Bas-Rhin, en relevant le peu de sollicitation des agents publics à réclamer de tels acomptes salariaux. Surtout, estime Mylène Jacquot de la CFDT, “ce qui serait déjà bien, c’est que les services RH disposent des moyens suffisants pour payer les agents en temps et en heure”.

ACTEURS PUBLICS : Article publié le vendredi 06 juin 2025 & Bastien SCORDIA

 

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