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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

NUMERIQUE

16 Avril 2024 , Rédigé par FO Services Publics 51

L’État lance la construction d’une suite d’outils numériques sécurisés pour les collectivités

Le cyber gardien de l’État, l'Anssi, a chargé l’Agence nationale de la cohésion des territoires de constituer une suite d’outils numériques de base, mais sécurisés, pour mieux protéger les petites collectivités, particulièrement vulnérables aux cyber menaces.

Après la “suite numérique de l’État”, la “suite numérique des collectivités” ? L’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) a lancé début janvier des travaux pour construire une boîte à outils numériques essentiels pour assurer un minimum de sécurité informatique dans des collectivités de plus en plus souvent victimes de cyber menaces. L’incubateur des territoires de l’ANCT est en pleine phase d’investigation, pour mieux cerner les besoins et les attentes des collectivités, ainsi que le périmètre exact que pourrait recouvrir cette future “suite numérique territoriale” commandée par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi).

Cette dernière a accordé 2,5 millions d’euros à l’ANCT pour qu’elle développe une plate-forme sécurisée à destination des collectivités volontaires, “et surtout des plus modestes, qui n’ont pas les moyens de sécuriser leur système d’information, soit une bonne partie des 35 000 communes de France”, explique Alexis Boudard, qui a pris la tête de l’incubateur de l’ANCT à la fin 2023. “L’objectif est de proposer une panoplie de services numériques de base pour faire disparaître les mauvaises pratiques, comme le mot de passe inscrit sur un Post-it collé à l’écran ou l’utilisation d’outils inadaptés, comme l’envoi de données et documents via Gmail ou WeTransfer”, explique le responsable.

Après une année d’accalmie, la menace “cyber” repart de plus belle

La convention signée le 7 décembre dernier entre les 2 agences fixe 3 priorités pour cette future plate-forme, qui devra mettre à disposition : un service de gestion de noms de domaine, pour s’assurer qu’une commune, aussi petite soit-elle, dispose d’un nom de domaine déposé, bien identifiable et officiel ; un serveur et un client mail rattaché à ce nom de domaine pour éviter le recours à des messageries pas toujours sécurisées et donner un caractère officiel aux adresses mail de la collectivité (60 % des collectivités utiliseraient des adresses mail détachées de tout nom de domaine, en @laposte.fr ou @wanadoo.fr, par exemple) ; et enfin un service de stockage de documents et données en ligne, lui aussi sécurisé, même si assez rudimentaire. 

Le nom de domaine, premier rempart

La réflexion, notamment sur ce que va précisément produire l’ANCT, est encore balbutiante. “Concernant les noms de domaine, nous n’allons clairement pas refaire un Gandi ou un OVH, mais nous appuyer sur des ressources existantes pour proposer un parcours utilisateur le plus simplifié et efficace possible pour pousser les collectivités à faire ce premier geste essentiel de déposer un nom de domaine pour mieux le protéger”, précise d’emblée Alexis Boudard. L’agence estime qu’environ 10 000 communes n’ont, par exemple, même pas de site Web, et donc probablement pas de nom de domaine non plus, ce qui laisse un boulevard aux escrocs pour usurper leur identité en ligne.

Avec son annuaire, l’État aide les petites communes à imprimer leur marque sur Internet

L’agence a déjà organisé plusieurs réunions et prévoit de mettre en place des “ateliers ouverts” réguliers afin de remonter les besoins, identifier des pistes de travail et tester des hypothèses auprès des partenaires côté État, comme la direction interministérielle du numérique (Dinum) et l’Anssi, et bien entendu auprès des représentants des collectivités et d’un certain nombre de collectivités pilotes.

Suite numérique minimale ou complète ?

Le gros du chantier consiste à proposer des services sécurisés tout en offrant un minimum de simplicité. À commencer par faciliter l’authentification des agents de la fonction publique territoriale à cette nouvelle suite d’outils. Ce qui suppose la mise à disposition d’un Agent Connect qui leur soit réservé. L’ANCT travaille d’ailleurs de très près avec la Dinum, qui a lancé les grandes manœuvres pour faire du “sac à dos numérique de l’agent” une véritable “suite numérique” d’outils collaboratifs et “souverains” pour les agents de l’État.

Dans les deux cas, le principal défi est d’arriver à créer du liant entre les différents outils, en permettant à un agent de s’y connecter avec un seul et même identifiant, quelle que soit son administration. “Le déploiement d’une identité numérique n’est pas évident avec tous les ministères, et il nous faudra composer avec la complexité des strates territoriales pour s’assurer de bien relier un identifiant au bon agent, et faire en sorte de couper les droits d’accès à un agent parti à la retraite par exemple”, reconnaît Thibaud Chambert-Loir, l’”intrapreneur” de la suite territoriale.

 

France et Allemagne main dans la main pour développer une suite numérique européenne

Le déploiement de cet Agent Connect de la territoriale est d’autant plus indispensable que l’ANCT veut profiter de l’occasion pour voir les choses en plus grand. Elle ne compte pas limiter sa “suite territoriale” aux 3 services de base demandés par l’Anssi, mais voudrait tester l’opportunité d’y inclure d’autres d'autres services, comme RDV Service public, l’outil de réservation et de gestion des rendez-vous, en cours de déploiement dans les petites communes. Ou d’autres services déjà opérés au niveau de l’État, comme la messagerie instantanée Tchap ou l’outil de transfert de fichiers volumineux France Transfert.

Complémentarité avec les opérateurs publics

L’agence réfléchit même à faire de cette plate-forme une vitrine, voire une porte d’entrée sur l’ensemble des services numériques – sécurisés – mis à la disposition des collectivités, notamment par les mutualisants informatiques (ou “opérateurs publics de services numériques”, les OPSN) déjà implantés sur les différents territoires.

Car il n’est pas question de marcher sur leurs plates-bandes. “Nous adoptons une approche complémentaire, pour valoriser les offres quand elles existent, veut rassurer Alexis Boudard. Nous n’irons pas déployer la suite dans les collectivités déjà bien couvertes par les OPSN”.

Un positionnement qu’Emmanuel Vivé, président du réseau français des OPSN, juge pertinent, tout en restant vigilant. “Imaginer que l’ANCT soit demain un OPSN national et que localement nous puissions aider pour assurer le dernier kilomètre peut être intéressant, sous réserve que l’on tienne compte aussi des innovations locales et que l’on laisse le choix aux territoires”, analyse celui qui dirige aussi la structure de mutualisation informatique de l’Oise, l’Adico.

 

L’État veut lever le risque juridique lié au partage de ses outils numériques avec les collectivités

C’est tout l’intérêt du processus de co-construction engagé par l’ANCT. Au-delà de l’articulation entre l’offre de services proposée par l’État au sein de la suite territoriale et celles des opérateurs locaux, la co-construction devra aussi accoucher d’un modèle économique viable pour la mise à disposition de la suite numérique… Viable et dans lequel tout le monde se retrouve. Le projet n’est encore qu’en phase d’investigation et aucune porte n’est encore fermée.

acteurs publics : article publie le mercredi 20 mars 2024 & EMILE MARZOLF

 

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