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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

DROIT DE RETRAIT : Modalités

Rédigé par FO Services Publics 51 Publié dans #STATUTS QUESTION-RÉPONSE

MAJ le 16 juillet 2020

DROIT DE RETRAIT

Modalités

Définition

Droit de retrait

Le droit de retrait permet à un agent de se retirer de sa situation de travail, et si nécessaire de quitter son lieu de travail pour se mettre à l’abri, lorsqu’il se trouve dans une situation dont il a un a motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé (art. L4131-1 du Code du Travail et art. 5-1 du décret n°85-603).

C’est un droit et non une obligation.

L’exercice du droit de retrait ne doit cependant pas créer pour d’autres personnes une nouvelle situation de danger grave et imminent.

Le droit de retrait s’exerce sous réserve de l’exclusion de certaines missions de sécurité des biens et des personnes, incompatibles avec l’exercice du droit de retrait. Ces missions ont été définies par arrêté interministériel du 15 mars 2001.

Il s’agit :

- pour les agents des cadres d’emplois des sapeurs-pompiers, des missions opérationnelles définies par l’article L.1424-2 du code général des collectivités territoriales relatif aux services d’incendie et de secours,

- pour les agents des cadres d’emplois de police municipale et pour les agents du cadre d’emplois des gardes champêtres et en fonction des moyens dont ils disposent, des missions destinées à assurer le bon ordre, la sécurité, la santé et la salubrité publique, lorsqu’elles visent à préserver les personnes d’un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé.

Danger grave et imminent (DGI)

Il s’agit de tout danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou temporaire prolongée. La notion de danger peut provenir d’une machine, d’un processus de fabrication, d’une situation ou d’une ambiance de travail. Ce danger est susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché (Circ. DRT 93-15 du 25 mars 1993).

La situation de danger grave et imminent doit être distinguée du "danger habituel " du poste de travail et des conditions normales d’exercice du travail, même si l’activité peut être pénible et dangereuse. Un travail reconnu dangereux en soi ne peut justifier un retrait.

Le caractère imminent du danger se caractérise par le fait que le danger est « susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché.

Obligation d’obéissance hiérarchique et devoir de désobéissance

Tout agent est tenu de se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique. Cependant, un agent est tenu de ne pas exécuter un ordre manifestement illégal et de nature compromettre gravement un intérêt public (Loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires). Ces deux conditions sont cumulatives et appréciées souverainement par le juge en cas de contentieux. (CE 10.11.1924 Sieur Langneur).

Exercice du droit de retrait et procédure

Devoir d’alerte

Tout agent est tenu d’avertir son supérieur hiérarchique ou le représentant de l’autorité territoriale, avant ou pendant l’exercice de son droit de retrait. L’alerte peut être aussi réalisée par un membre du comité compétent (CHSCT ou CT) constatant la présence d’un danger grave et imminent. Dans les deux cas, le signalement est recueilli dans le registre établi à cet effet, le registre des dangers graves et imminent (cf. exemple de registre des dangers graves et imminents).

Cette mesure d’alerte n’est soumise à aucun formalisme : elle peut se faire verbalement ou par écrit.

Phase d’enquête

Une fois avertie, l’autorité territoriale doit mener une enquête pour déterminer si la situation présente un Danger Grave et Imminent et quelles sont les mesures à mettre en place pour l’éviter.

En cas d’accord des différentes personnes présentes lors de l’enquête, les actions correctives sont inscrites dans le registre des dangers graves et imminents.

En cas de désaccord, une réunion extraordinaire du Comité compétent (CHSCT/CT) doit être effectuée dans, les 24 heures pour lever la source du désaccord.

Si le désaccord persiste, l’agent chargé de la fonction d’inspection doit être sollicité pour qu’il intervienne dans la collectivité.

A l’issue de son intervention, l’agent chargé de la fonction d’inspection donne son avis sur la situation et préconise des actions correctives à mettre en place.

Si les personnes ne sont pas d’accord sur la réalité de la situation, l'autorité territoriale ainsi que la moitié au moins des représentants titulaires du personnel au sein du Comité compétent peuvent solliciter l'intervention :

- de l'inspection du travail.

- et dans leurs domaines d'attribution respectifs :

→ Un membre du corps des vétérinaires inspecteurs ou

→ Un membre du corps des médecins inspecteurs de la santé et du corps des médecins inspecteurs régionaux du travail et de la main-d’œuvre

→ le service de la sécurité civile.

L’intervention donnera lieu à un rapport adressé à l’autorité territoriale, au comité compétent et à l’agent chargé de la fonction d’inspection. La réponse atteste ou non la présence d’un danger grave et imminent et détermine les mesures prises et les actions à mettre en place et devra servir de base pour la mise en place ou non d’actions correctives.

Conséquences liées à l’exercice d’un droit de retrait

Lors de la procédure, l’agent ne doit pas reprendre son poste de travail tant que la situation n’est pas réglée.

En revanche, dès que le danger cesse, l’agent est tenu de reprendre son service. Cette reprise de service n’est pas subordonnée à une information préalable de l’employeur des mesures prises pour faire cesser le danger, ou à l’invitation à reprendre son service.

Le droit de retrait ne s’applique qu’à la seule situation susceptible de présenter un danger grave et imminent pour la vie ou la santé : l’agent qui exerce ce droit ne peut donc cesser toute activité, y compris celles dépourvues de tout danger.

Le droit de retrait n’entraîne ni sanction, ni retenue sur salaire pour l’agent qui avait un motif raisonnable de penser que la situation de travail présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé.

Une erreur de l’agent quant à l’appréciation de la situation et à l’existence d’un danger grave et imminent ne constitue pas une faute sanctionnable quand il avait un motif raisonnable de croire à un danger grave et imminent.

En revanche, si l’exercice du droit de retrait a été abusif, une retenue de salaire pour absence de service peut être effectuée. De plus, l’agent s’expose à des sanctions disciplinaires et peut voir sa responsabilité civile et pénale engagée si le retrait injustifié a eu des conséquences dommageables pour des tiers.

En cas de litige, il appartiendra au juge de déterminer les fautes de chaque partie.

Exemples de droit de retrait

Dans le cadre d’exercices de ce droit, le juge a pu se prononcer sur le caractère légal ou non de l’utilisation du droit de retrait.

Situation où le droit de retrait a été validé

a) Un salarié refuse d'exécuter des tâches qu'il estime dangereuses, sans sécurité et sans protection, en l'espèce, la remise en jeu de croisées en bois d'appartements situés aux premiers et troisièmes étages d'un immeuble ; il a justifié d'un motif raisonnable de penser que la situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé, et nécessite une mesure de protection collective ou individuelle, destinée à empêcher les chutes de personnes (Cass. Soc., 9 mai 2000, no 97-44.234 : Bull. civ. V, no 175).

b) Le refus d'un veilleur de nuit de se présenter à son poste, alors qu'il avait été menacé directement par un résident du foyer, ivre, qui avait cassé la baie vitrée de protection, est justifié quand l'employeur alerté n'a pris aucune précaution à l'encontre du danger qui persistait (CA Paris, 27 mars 1987).

c) La grève des salariés, en raison du défaut persistant de conformité des installations de l'entreprise avec les normes de sécurité, est liée à l'existence d'un danger grave et imminent. A juste titre, le conseil des prud'hommes a pu ordonner le paiement des salaires des jours de grève, sur le fondement de l'article L. 231-8 du code du travail (Cass. soc., 1er mars 1995, no 91-43.406, SARL CBH c/ Faineteau).

d) Constitue un motif raisonnable justifiant l'exercice de son droit de retrait par le salarié la défectuosité du système de freinage du camion de l'entreprise, alors qu'après l'interdiction de circulation émise par le service des mines, l'employeur était tenu de présenter le véhicule à une contre-visite afin que ce même service des mines puisse garantir l'intégralité des réparations effectuées. En attendant ce nouveau contrôle, le salarié était en droit de penser que la conduite de ce camion présente un danger grave et imminent pour sa vie, les tiers, ainsi que le matériel de l'entreprise. Le licenciement fondé sur le refus de conduire le véhicule était dès lors sans cause réelle et sérieuse (CA Montpellier, ch. soc., 30 avr. 1998, no 857, SA Pinault équipement c/Zavierta).

e) L’absence de solidité de l’échafaudage sur lequel travaillait un peintre. (Cass 02-45401 du 23.06.2004).

f) L’opération consistant à installer des illuminations de Noël à partir d’une échelle et d’un godet de tracteur levé à 4mètres du sol dans lequel l’agent devait prendre place. (TA Besançon n°960071du 10.10.1996).

Situation où le droit de retrait n’a pas été validé

a) La dégradation accidentelle des conditions de travail ne peut justifier l'exercice du droit de retrait par un salarié, en l'absence de danger grave et imminent. Le niveau sonore habituellement subi par le salarié était de 82 décibels et s'était élevé à 88 décibels. Selon le conseil des prud'hommes, une mesure individuelle de protection, bouchons antibruit, aurait pu suffire à remédier aux nuisances constatées, le seuil dangereux se situant à 90 décibels pendant quarante heures d'exposition (Cons. prud'h. Béthune, 31 oct. 1984 : JCP éd. E 1985, no 14439).

b) De même, lorsqu’à la suite de l'attaque à l'arme lourde d'un fourgon blindé un convoyeur de fonds refuse de poursuivre son travail et est licencié. Le recours à la notion de retrait est rejeté dans la mesure où le danger n'apparaît pas imminent, la récidive étant un risque impondérable, l'employeur a pris des dispositions supplémentaires de sécurité. Le risque est inhérent à la fonction exercée et initialement accepté par le salarié (CA Aix-en-Provence, 8 nov. 1995, no 1055, Sté Securiposte c/ Lacombe : JCP éd. E 1996, II, no 859).

c) Ne constitue pas un danger grave et imminent justifiant l'exercice du droit de retrait l'agression isolée d'un machiniste de la RATP sur une ligne de bus, alors que des mesures de sécurité ont été prises sur la ligne concernée. Lorsque le salarié de la même ligne a arrêté le travail pour retourner au dépôt, le danger n'était plus imminent, ni sérieux du fait des mesures préventives mises en œuvre, même si ce conducteur avait déjà fait l'objet d'agressions antérieures dans l'exercice de son activité professionnelle (CA Paris, 21e ch., 26 avr. 2001, no 99/35411, Vernevaux c/ RATP).

d) Le fait pour un agent affecté à la surveillance de la voie publique de se trouver seul à procéder à la verbalisation des contrevenants au stationnement payant. (CAA Lyon n°07LY00746 du 22.12.2009).

e) Les travaux de nettoyage des regards d’égouts par une température extérieure inférieure à 8 degrés et sans que l’agent soit équipé d’un blouson avec bandes réfléchissantes. (TA Besançon du 10.10.2005).

f) Les émanations de solvants provoquées par la pose de moquette dans les locaux où travaillait l’agent (CAA Versailles n°03VE02598 du 13.12.2005).

Sources et documents consultables

- Code du Travail, articles L4131-1 à L4131-4,

- Code général des collectivités territoriales, article L1424-2,

- Loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Loi dite loi Le Pors, article 28,

- Décret n°85-603 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale, article 5-1,

- Arrêté du 15 mars 2001 portant détermination des missions de sécurité des personnes et des biens incompatibles avec l'exercice du droit de retrait dans la fonction publique territoriale,

- Circulaire n°93/15 du 25 mars 1993 relative à l'application de la loi n°82.1097 du 23 décembre 1982 (modifiée par la loi n°91.1414 du 31 décembre 1991) et du décret n°93.449 du 23 mars 1993,

- Circulaire du 12 octobre 2012

Pour en savoir plus, retrouvez ci-dessous les documents suivants au format PDF :

→ La fiche spécial "Droit de Retrait" de Force Ouvrière

→ La réponse à la question écrite n° 28907 du 9 juin 2020 Weka.fr

→ Le document "Sécurité et droit de retrait dans la fonction publique" service-public.fr

→ Le droit d’alerte et de retrait des agents territoriaux en 10 questions Lagazette.fr

 

 

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