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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

DEONTOLOGIE

9 Juin 2023 , Rédigé par FO Services Publics 51

Contrôle des mobilités public-privé : encore des lacunes au sein des administrations

Dans son rapport d’activité pour l’année 2022, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) constate une “amélioration de la compréhension” par les administrations des nouvelles règles en matière de contrôle déontologique des agents publics. Des “difficultés d’appropriation” persistent néanmoins.

Saison 2. Le président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), Didier Migaud, a présenté, ce mercredi 31 mai, le rapport d’activité 2022 de l’autorité administrative indépendante. Il concerne la deuxième année de plein exercice de ses nouvelles compétences en matière de contrôle de mobilités public-privé. Et ce fut un exercice “sans commune mesure”, selon son président. 

L’année dernière a en effet été marquée par un nombre “exceptionnel” de contrôles des mobilités exercés par la HATVP, qui est seule en charge, depuis le 1er février 2020, de ce contrôle déontologique en lieu et place de feue la Commission de déontologie de la fonction publique. Comme prévu par la loi de transformation de la fonction publique de 2019, la saisine obligatoire de la HATVP ne concerne plus que les agents les plus exposés qui envisagent de rejoindre le privé. 

En contrepartie, les administrations sont responsabilisées, la loi leur confiant le contrôle déontologique des autres agents. En cas de “doute sérieux”, celles-ci peuvent saisir leur référent déontologue et, si le doute subsiste, l’autorité hiérarchique peut alors saisir la HATVP. Autre nouveauté de la loi de 2019, et non des moindres : la création d’un mécanisme de contrôle “retour ou arrivée” pour les personnes ayant exercé une activité privée au cours des trois dernières années et qui souhaitent accéder à certains emplois du secteur public.

+ 93 % de saisines 

Dans le détail, donc, le nombre de saisines de la HATVP a connu une “forte hausse” l’année dernière et était supérieur “près de deux fois” à celui de 2021. En 2022, 639 saisines ont ainsi été enregistrées, contre 319 en 2021, soit une augmentation de 93 %. La majeure partie de ces saisines (51,9 %) concernait des mobilités d’agents publics vers le secteur privé et 39,3 %, des contrôles préalables à la nomination dans le secteur public. Les autres cas de saisine étaient relatifs à des mobilités vers le privé d’anciens membres du gouvernement, d’exécutifs locaux ou d’autorités indépendantes (6,1 % des saisines) et à des cumuls d’activités pour la création ou la reprise d’entreprises (2,7 %).

Sans surprise, cette forte croissance des saisines est liée à l’actualité politique, particulièrement la nomination du nouveau gouvernement, en mai 2022, après l’élection présidentielle et le remaniement de juillet 2022 consécutif aux élections législatives. Un contexte politique qui a entraîné une forte sollicitation de la HATVP, en raison du départ de nombreux responsables publics vers le privé, notamment les membres des cabinets ministériels. Aussi près de la moitié des saisines enregistrées en 2022 (45 % précisément) ont-elles été concentrées sur les seuls mois de mai, juin et juillet.

Au total, sur les 639 saisines enregistrées, 581 ont donné lieu un avis de la HATVP, dont 69 % d’avis de “compatibilité avec réserves”, 27,2 % de “compatibilité simple” et 3,8 % d’incompatibilité.

Très peu de saisines sur les déclarations d’intérêts

Dans son rapport d’activité, la HATVP constate aussi une “amélioration de la compréhension” par les administrations des dispositifs de contrôle des mobilités public-privé. En attestent la diminution “drastique” des avis d’incompétence et d’irrecevabilité (moins de 4 % en 2022 contre 33 % en 2020) et l’“amélioration de la qualité des dossiers de saisine”. Des difficultés persistent toutefois dans l'appropriation par certaines administrations des nouvelles procédures de contrôle déontologique, relève la HATVP.

Parmi les difficultés relevées par la haute autorité, figurent notamment le “très faible nombre de saisines subsidiaires” en matière de contrôle préalable à la nomination (une seule en 2022) ce qui “laisse planer un doute quant à la réalisation effective de ce contrôle par les administrations”. Les cas de saisines pour avis de la HATVP sur les déclarations d’intérêts que certains agents doivent transmettre sont également “rares”.

L’autorité relève aussi que, dans de nombreux cas, l’autorité hiérarchique s’abstient de rendre sa décision après l’avis du référent déontologue ou de la HATVP. “Or, en l’absence de décision expresse de l’administration autorisant le projet de l’agent, celle-ci est réputée s’y être opposée et l’agent n’est alors pas autorisé à le mettre en œuvre”, pointe-t-elle. D’où l’enjeu du formalisme. La HATVP constate également le peu de saisines émanant de la fonction publique hospitalière – une dizaine seulement en 2022. Certaines d’entre elles étaient d’ailleurs irrecevables, ce qui a permis à la haute autorité de constater que plusieurs établissements sanitaires et médico-sociaux n’étaient pas dotés de référent déontologue.

Améliorations possibles dans le suivi des avis et les sanctions

La HATVP profite de son rapport pour revenir sur l'enjeu du suivi des défauts de saisine et du respect des avis qu’elle émet. “La détection des défauts de saisine et le suivi du respect des avis et décisions rendus sont essentiels, souligne-t-elle. La réalisation de ces suivis repose tant sur la Haute Autorité que sur les administrations.” L’occasion pour la HATVP de réclamer des moyens supplémentaires pour assurer le suivi du respect de ses avis.

Au-delà, il appartient aux administrations de faire œuvre de pédagogie auprès de leurs agents en leur communiquant les informations relatives à leurs obligations en matière de contrôles déontologiques et de “s’assurer que celles-ci sont respectées”. Pour améliorer le contrôle des mobilités public-privé, la HATVP appelle aussi à préciser les sanctions applicables par l’autorité hiérarchique en cas de défaut de saisine ou de non-respect des avis rendus par la HATVP. Ces sanctions présentent aujourd'hui “plusieurs lacunes”, souligne en effet la haute autorité. 

Cette dernière propose aussi de créer un contrôle des mobilités vers le secteur privé pour les agents de certains établissements publics à caractère industriel et commercial (Epic) lors de mobilités vers le privé. Cela concerne notamment les agents de l’Union des groupements d’achats publics (Ugap) et de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo). Pour la HATVP, ce contrôle sera également nécessaire pour les agents de la Caisse des dépôts et consignations et pour les agents d’établissements publics rattachés aux collectivités territoriales, comme les offices publics de l’habitat (OPH).

ACTEURS PUBLICS : article publics le mercredi 31 mai 2023 & BASTIEN SCORDIA

4 dossiers transmis à la justice 
En 2022, la HATVP a saisi à 4 reprises la justice de faits susceptibles de constituer un délit de prise illégale d’intérêts dans le cadre du contrôle a posteriori de mobilités vers le privé. La Haute Autorité cite ainsi l’exemple d’un ancien agent public qui, dans le cadre de son activité privée, a réalisé une prestation pour une société qui avait précédemment reçu une subvention instruite par les services placés sous sa responsabilité. Elle cite aussi le cas d’un autre ancien agent public qui a débuté une activité dans une entreprise à laquelle ont été attribués plusieurs marchés publics. Or l’agent en question avait précédemment participé à l’analyse des offres et aux négociations avec les candidats à ces marchés.

 

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