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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

COLLECTIVITES TERRITORIALES

7 Août 2023 , Rédigé par FO Services Publics 51

Budget vert : l'outil qui agite les collectivités

Le député Renaissance Thomas Cazenave s’apprête à déposer une proposition de loi pour généraliser la réalisation d’un "budget vert" dans les collectivités. Lorsqu’elle est déployée, cette démarche permet de mobiliser élus et agents locaux sur les enjeux de transition écologique.

Le constat commence à faire consensus : la mobilisation des territoires est indispensable pour réussir la transition écologique. La planification écologique locale est "l’un des enjeux forts du moments", selon les mots de Thomas Cazenave, prononcés lors d’une réunion de la délégation aux collectivités territoriales qui s'est tenue à l’Assemblée nationale le 12 juillet dernier. L’occasion, pour le président de la délégation, de présenter la proposition de loi qu’il s’apprête à déposer, visant à rendre obligatoire la réalisation d’un "budget vert" dans toutes les collectivités de plus de 50 000 habitants. L’initiative n’émerge pas de nulle part : l’idée d’évaluer les dépenses publiques à l’aune de leur impact environnemental fait du chemin dans les territoires depuis de nombreuses années. Sur les 150 collectivités interrogées dans le cadre d’une étude que le think tank indépendant I4CE rendra publique à la rentrée, 94 comptent mettre en place un budget vert dans un avenir proche.

Concrètement, réaliser un budget vert consiste à évaluer l’impact environnemental des différentes dépenses d’une administration. La méthode de référence en la matière est celle réalisée par I4CE en 2019, à la suite de sollicitations de plusieurs collectivités. Si elle portait seulement sur les enjeux climatiques à ses débuts, sa grille d’analyse prend désormais en compte l’adaptation au changement climatique ainsi qu’un volet biodiversité. Face à la demande croissante, les travaux d’I4CE se sont également poursuivis pour dupliquer la méthode – initialement dédiée aux communes – à d’autres niveaux de collectivités, notamment les conseils régionaux.

"C’est devenu un véritable outil d’arbitrage"

"Cet outil est principalement utile pour monter en compétences et permettre aux élus et techniciens des administrations locales de s'approprier les sujets environnementaux", soutient François Thomazeau, chef de projet Collectivités et Financement public chez I4CE. Les différents retours que l’institut a reçus vont en effet dans ce sens : intégrer la dimension environnementale dans la définition du budget permet de faire monter le sujet dans les collectivités. Leur mot d’ordre : "les résultats obtenus sont moins importants que la démarche utilisée pour les obtenir". Nicolas Méary, vice-président en charge de la biodiversité et de la transition écologique au Conseil départemental de l’Essonne, l’a constaté après la mise en place du budget vert au sein du département, en avril dernier. "C’est un facteur de réflexion, de prise de conscience collective et une manière d’impulser un changement culturel au sein de l’institution départementale", assure-t-il.

Bientôt des conférences de dialogue État-collectivités pour simplifier les normes

Un avis partagé par la mairie de Pessac, qui a réalisé sa propre méthodologie à l’aide de l’AFNOR, afin de contribuer à la transition écologique avec une approche systémique. "La réalisation du budget vert a permis de mettre la transition écologique au cœur de l’action municipale et d’engager l’ensemble de la collectivité vers le progrès. C’est devenu un véritable outil d’arbitrage", se réjouit Stéphanie Grondin, adjointe au maire et délégué aux finances et à la commande publique.

"Nous n’avons plus du tous les mêmes débats lors des conférences budgétaires, qui tournent désormais toujours autour des enjeux de transition écologique", complète Franck Raynal, le maire de la ville. L’équipe municipale a également constaté que la connaissance de l’interdépendance entre les différents sujets a rendu l’action publique plus cohérente et a permis d’apporter davantage de transparence aux citoyens. Par exemple, les objectifs de développement durable peuvent désormais être considérés comme des critères dans le cadre des demandes d’attribution budgétaire aux associations ou entreprises de la ville.

Les conditions nécessaires à un déploiement efficace

Nicolas Méary insiste tout de même sur l’ampleur du chantier que la mise en place d’une telle mesure représente. Les services départementaux de l’Essonne ont réalisé un important travail d’analyse, politique par politique. "Cela fait deux ans que nous préparons la démarche. Pour que ce soit utile, il faut qu’il soit issu d’un travail de fond", explique le vice-président du département, qui a fait le choix d’analyser 746 lignes budgétaires. Pour garantir des résultats efficaces et transversaux, I4CE conseille de mettre en place une montée progressive de l’outil. La méthode propose un passage en revue de toutes les dépenses en fonction de critères définis, mais il est possible de commencer par seulement prendre en compte le bâtiment la première année, avant d'ajouter progressivement des dépenses supplémentaires.

Alexandre Grosse : “Le budget vert met en lumière la complexité de la décision publique”

Pour aider les agents à s’approprier cet outil, la mairie de Pessac a ainsi mis en place des formations à destination de l’ensemble des agents et organise un nouveau séminaire à l’automne prochain. "J’ai veillé à ce que personne ne se sente à l’écart, car les finances sont par essence totalement transversales", relate son maire, Franck Raynal. Toutes les formations n’ont pas le même degré de détail : la mairie a mis en place un socle commun ainsi que des spécialisations en fonction des agents.

La généralisation est-elle vraiment une bonne idée ?

"Selon les retours d’expérience, il est avant tout nécessaire qu’il y ait un vrai portage politique, une volonté de faire progresser la collectivité. Si c’est juste un gadget qu’on fait pour le faire, cela n’aura aucun effet", alerte néanmoins François Thomazeau. Dans l’absolu, l’institut défend la généralisation de la démarche mais craint que rendre le budget vert obligatoire puisse s’avérer contre-productif. Même son de cloche chez Nicolas Méary, qui considère que le niveau de maturité sur ces sujets reste encore trop faible. "Je ne suis pas sûr que le rendre dès à présent obligatoire permette à chacun de s'approprier les enjeux.

 Il faut préalablement avoir une volonté d’avancer, si c’est simplement une obligation administrative de plus je ne suis pas sûr que l’aspect vertueux de la démarche sera atteint". Cela ne signifie pas que la proposition de loi de Thomas Cazenave doit passer à la trappe : celle-ci laisse le gouvernement libre de définir la méthode qui sera retenue.

Un observatoire pour accompagner l’essor de l’intelligence artificielle dans les collectivités

"Il faut faire attention à laisser de la souplesse aux acteurs locaux, afin qu’ils s’approprient le sujet. On plaide plutôt pour que l’État se positionne comme un producteur de guides et de référentiels, plus que comme un producteur de réglementations", soutient de son côté François Thomazeau. A l’image des initiatives en la matière en Occitanie, où les collectivités peuvent être accompagnées par des opérateurs de l’État, comme l’Ademe, qui conclut des marchés avec le Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT) pour accompagner les communes souhaitant mettre en place un budget vert.

ACTEURS PUBLICS : article publie le jeudi 20 juillet 2023 & PHILIPPINE RAMOGNINO

 

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