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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

JUDICTIONS FINANCIERES

1 Décembre 2021 , Rédigé par FO Services Publics 51

Les députés approuvent la réforme de la responsabilité des gestionnaires publics

Les députés viennent d’adopter l’article 41 du projet de loi de finances pour 2022, habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnance pour créer un régime unifié de responsabilité des ordonnateurs et des comptables publics pour les fautes les plus graves. Compte-rendu.

Vingt-trois minutes tout juste. C’est le temps que les députés ont mis, vendredi 12 novembre, pour examiner et adopter l’article 41 du projet de loi de finances pour 2022 habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnance pour réformer le régime de responsabilité des gestionnaires publics. Une réforme sensible qui vise à créer un régime unifié de responsabilité des ordonnateurs et des comptables publics pour les fautes les plus graves. Précisément pour les fautes graves relatives à l’exécution des recettes ou des dépenses ou encore à la gestion des biens des entités publiques “leur ayant causé un préjudice financier significatif”. L’examen de cet article complexe et sensible avait duré douze minutes en commission. 

“La réforme ne revient pas sur la séparation de l’ordonnateur et du comptable, principe fondamental de notre système et gage de sécurité, a souligné en séance le ministre chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt. Les contrôles des comptables seront maintenus mais dans un nouveau cadre, recentré sur les enjeux les plus importants.”

“Affaire très délicate”

Le ministre répondait alors au député Liberté et Territoires Charles de Courson, magistrat de la Cour des comptes de formation et l’un des 2 seuls députés à avoir pris la parole lors des débats sur cet article 41 [voir encadré].

Hormis, bien entendu, le rapporteur général du budget, Laurent Saint-Martin (LREM), et le président de la commission des finances, Éric Woerth (LR), qui pense “plutôt du bien de cette réforme”.“Elle est attendue depuis longtemps, a affirmé l’élu de droite. Notre système de sanctions ne fonctionne plus, la Cour de discipline budgétaire et financière est une machine vieillissante.”

Lors des débats, Charles de Courson s’est notamment plaint de la “forme” avec laquelle était menée cette réforme de la responsabilité, à savoir en recourant à une ordonnance : “La réforme est tout de même une affaire très délicate qui mériterait un examen approfondi et un texte à elle toute seule […] une fois de plus, le gouvernement se substitue au Parlement”, a-t-il regretté. L’occasion pour le député Liberté et Territoires de pointer un régime unifié de responsabilité “inadapté” en raison de la différence des fonctions des ordonnateurs et des comptables.

Pas de définition précise de la “faute grave” 

Le député a également regretté que l’article d’habilitation ne précise pas la notion de “faute grave”, qui sera sanctionnée demain. Il proposait ainsi de définir cette faute grave comme “des carences sérieuses dans des contrôles, des omissions, des négligences répétées qu’un gestionnaire public raisonnable n’aurait pu commettre”. “On ne peut en effet se contenter du concept vague de faute grave”, a abondé Charles de Courson, en défendant un amendement en ce sens. 

La réforme de la justice financière divise ses magistrats

“La notion de faute grave devra bien entendu être précisée dans l’ordonnance mais, de fait, elle le sera aussi par la jurisprudence, lui a répondu le rapporteur général, Laurent Saint-Martin. Ce qu’il faut comprendre, car c’est tout l’intérêt de la réforme, c’est que la faute grave relèvera désormais d’un traitement juridictionnel, tout le reste relevant de la sanction managériale.” L’amendement de Charles de Courson a finalement été rejeté. 

Ce député alerait également sur le manque d’encadrement de la notion de “préjudice financier significatif”. 

Charles de Courson avait ainsi déposé un amendement pour le définir comme un préjudice “substantiel, irrémissible et non régularisable” d’une valeur au moins égale à 50 000 euros. “Pourquoi cette somme ? Là encore, il faut garder de la souplesse si l’on veut que cette réforme soit utile, étant entendu que souplesse ne signifie pas laxisme”, a rétorqué Laurent Saint-Martin, en émettant un avis défavorable sur l’amendement de Charles de Courson. Un amendement qui a, lui aussi, été rejeté par les députés. 

Ordonnance avant la fin du quinquennat

Plus tôt, avant l’examen de ces amendements, Olivier Dussopt avait donné quelques précisions sur le nouveau cadre d’intervention du juge financier : son intervention “sera moins fréquente” et “se concentrera” sur les “fautes dont la gravité conduit à modifier les grands équilibres du budget ou des comptes d’un organisme et qui portent ainsi atteinte à la sincérité de l’information financière”. 

Outre des amendes ou des peines d’interdiction d’exercer des fonctions de gestionnaire, le régime de sanction “s’articulera avec le déploiement d’une réponse managériale” qui “sanctionnera les erreurs ou les fautes qui ne relèvent pas du juge”, a développé le ministre. “C’est la marque de la confiance que nous faisons à l’encadrement pour sanctionner des erreurs de gestion non intentionnelles et n’ayant pas entraîné de préjudice significatif”, a-t-il ajouté.

L’article 41 du projet de loi de finances pour 2022 doit désormais être examiné par les sénateurs. S’il est définitivement adopté, l’ordonnance de réforme de la responsabilité des gestionnaires publics devra être prise dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi. Soit d’ici la fin du quinquennat, pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2023 au plus tard. 

Vers la disparition des chambres régionales des comptes du paysage contentieux ? 
Deuxième et seul autre député à intervenir, Daniel Labaronne (LREM) s’est fait le relais des inquiétudes des syndicats des juridictions financières (SJF) et en particulier du SJF représentant les magistrats de chambres régionales des comptes (CRC).

Avec la réforme, ceux-ci se sont en effet “inquiétés de la disparition” des CRC du “paysage contentieux”.

 “On pourrait voir là une remise en cause de la proximité, les magistrats des CRC connaissant très bien le contexte local, a souligné le député. La suppression de la qualité de juridiction des CRC risque d’amoindrir la capacité de détection des atteintes à la probité ou des infractions financières.” Comme il vient de le faire dans nos colonnes, le ministre des Comptes publics, Olivier Dussopt, a balayé ces inquiétudes “tant sur la place” des CRC “que sur leur capacité à exercer la plénitude de leurs missions”. “Faisons en sorte que les poursuites et les sanctions se concentrent sur les fautes graves, celles qui ont des conséquences financières significatives, celles qui sont intentionnelles, celles qui revêtent, d’une certaine manière, un caractère délictuel, a développé le ministre. Dès lors, le nombre de jugements doit diminuer et les instances régionales de jugement perdent de leur intérêt, d’où notre proposition d’instances qui mêlent magistrats de la Cour des comptes et magistrats de CRC.” 

ACTEURS PUBLICS : article publie le lundi 15 novembre 2021 & BASTIEN SCORDIA

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