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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

MANAGEMENT

18 Juin 2024 , Rédigé par FO Services Publics 51

Un manager peut être exigeant sans pour autant être coupable de harcèlement

La cour administrative d’appel de Bordeaux vient de rendre un arrêt relatif à un directeur d’établissement public qui était accusé de harcèlement moral. Ce manager était “perfectionniste et exigeant envers l’ensemble du personnel, y compris lui-même avec parfois des réactions d’agacement lorsqu’il estimait que la qualité du service rendu au public n’était pas suffisante”. Pour les juges, néanmoins, “ce comportement ne saurait caractériser une faute détachable du service”.

 

Les administrations ne peuvent pas reprocher à leurs managers d’être exigeants et perfectionnistes. C’est ce que vient d'indiquer la cour administrative d'appel de Bordeaux dans un arrêt relatif au cas du directeur d'un établissement public qui était accusé de harcèlement moral. 

Attaché territorial, celui-ci avait été recruté en 2008 par le département de la Charente en tant que directeur de l'établissement public de Chassenon. Un établissement qui était notamment chargé de gérer et de développer le site archéologique de l’agglomération gallo-romaine situé sur le territoire de cette commune. 

En février et mars 2014, deux agents de l'établissement public avaient néanmoins déposé plainte contre ce directeur pour harcèlement moral. Si le tribunal de grande instance d’Angoulême avait rendu une ordonnance de non-lieu en novembre 2016, le tribunal administratif de Poitiers avait toutefois condamné le département en octobre 2018 à indemniser l'une des plaignantes et à lui verser quelque 15 000 euros. 

Un titre exécutoire de 15 000 euros

L'affaire n'en était pas restée là pour autant, puisque le département de la Charente avait engagé une “action récursoire”*à l'encontre du directeur de l'établissement public au motif qu'il avait “commis une faute personnelle détachable de ses fonctions” à l'origine des préjudices des plaignantes. La collectivité avait émis à son encontre un titre exécutoire de 15 000 euros pour que ce directeur rembourse lui-même l'indemnité versée par le département à la plaignante. Une décision que le directeur avait décidé d'attaquer en justice. 

En première instance, en mai 2021, le tribunal administratif de Limoges avait estimé que les préjudices subis par la plaignante étaient imputables à hauteur de 75 % à une faute personnelle du directeur de l'établissement public. Les juges avaient ainsi annulé partiellement le titre exécutoire émis à son encontre. Ce directeur estimait néanmoins qu'il devait être exonéré totalement du remboursement de cette indemnisation. La cour administrative d'appel de Bordeaux lui donne aujourd'hui raison. 

Pas de faute personnelle

Dans le détail, dans sa plainte pour harcèlement moral à l'encontre du directeur, cette agente – une médiatrice culturelle – avait fait état d'une “charge de travail trop lourde”, “d'heures supplémentaires non prises en compte”“d'une absence de soutien l'empêchant de s'imposer face à son équipe” et “de critiques injustifiées du directeur”, lequel lui aurait notamment annoncé au dernier moment qu'elle devrait travailler le week-end précédant une semaine de congés alors qu'elle avait pris une location. 

Des témoignages recueillis lors de l'instruction de cette plainte ont aussi fait apparaître que ce directeur “était perfectionniste et exigeant envers l'ensemble du personnel(…) y compris lui-même, (…) avec parfois des réactions d'agacement lorsqu'il estimait que la qualité du service rendu au public n'était pas suffisante”, est-il écrit dans l'arrêt de la cour. Pour celle-ci, néanmoins, “ce comportement ne saurait caractériser une faute détachable du service”. 

Les juges ajoutent qu’“aucun fait précis n'est évoqué en ce qui concerne ni un temps de travail et une charge de travail excessifs, ni une absence de soutien”.

Les pièces du dossier “permettent seulement d'identifier des propos irrespectueux tenus (par le directeur) à deux reprises en quatre ans”, explique la cour. Mais ces faits ponctuels, “si regrettables soient-ils, (…) ne sauraient caractériser un harcèlement moral”, poursuit-elle, avant de conclure que ce directeur n'a commis “aucune faute personnelle”. Aussi la cour annule-t-elle intégralement le titre exécutoire émis à son encontre. 

ACTEURS PUBLICS : article publie le lundi 06 mai 2024 & BASTIEN SCORDIA

* Une action récursoire est une action permettant à celui qui a réparé, à l’amiable ou par condamnation, un dommage qu’il n’avait pas causé ou dont il n’était pas l’auteur exclusif, d’exercer ensuite un recours contre le véritable responsable afin d’obtenir remboursement des sommes versées (source : Dalloz).

 

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