GESTION RESSOURCES HUMAINES
Le reclassement, une procédure à mieux intégrer dans les cultures RH des collectivités
Bien connue et utilisée des professionnels des ressources humaines, la procédure de reclassement des agents territoriaux pour inaptitude reste compliquée à mettre en œuvre et peu efficace. Dans un versant caractérisé par de nombreux métiers à haut degré de pénibilité, il convient d’améliorer les usages.
Changer de regard sur le reclassement est nécessaire. Tel est le signal envoyé par le dernier Observatoire sur l’absence au travail, mené par la Mutuelle nationale territoriale (MNT). “Notre première étude sur les absences au travail a identifié la gestion des reclassements comme l’un de leurs motifs, expose Laurent Besozzi, vice-président de la MNT. Les dispositifs actuels, certes en progrès, restent complexes et perçus comme un parcours d’obstacles.”
Pas de droit au reclassement pour les fonctionnaires stagiaires dont l’emploi est supprimé
Les résultats de l’Observatoire sont le fruit d’entretiens réalisés auprès d’agents ayant vécu un reclassement réussi ou évité, mais aussi de managers et psychologues du travail. Le reclassement reste le dispositif de référence dès lors qu’une maladie porte atteinte durablement aux capacités d’action des agents. Pourtant, il reste difficile à mettre en œuvre et souvent synonyme d’échec. Ainsi, moins de la moitié des agents interrogés, soit 48 %, retrouvent un poste au terme de la recherche de reclassement.
“Aux problèmes de santé à surmonter, s’ajoute une épreuve professionnelle, sociale et intime qui peut se transformer en naufrage”, poursuit Laurent Besozzi. L’Observatoire met notamment en avant des données sur le nombre moyen d’années à partir duquel on observe un risque d’avis médical défavorable sur certains postes, que ce soit un avis d’aménagement, de restrictions médicales ou encore d’inaptitudes.
Les agents d’accueil sont les plus exposés
Parmi les métiers les plus exposés, celui d’agent d’accueil arrive en première position. C’est en effet sur cette profession que les premiers risques arrivent le plus tôt : en moyenne, après sept ans passés sur le poste, un avis de restriction médicale intervient, puis un avis d’inaptitude au bout de huit ans en moyenne pour un avis d’aménagement de poste après neuf ans de carrière. Les autres postes les plus exposés sont ceux de chargé de propreté des locaux, d’assistant de gestion administrative, d’animateur enfance-jeunesse, d’assistant éducatif petite enfance, d’agent d’accompagnement à l’éducation de l’enfant, d’agent de restauration, ou encore de chargé d’espaces verts.
Reclassement : les fonctionnaires inaptes peuvent prétendre à des emplois en voie de suppression
Face à cette situation, “il faut dépasser la fatalité d’une déclaration d’inaptitude qui tombe comme un couperet, synonyme d’exclusion”, poursuit Laurent Besozzi. Pour lui, l’anticipation peut passer par la prévention, la reconversion en amont et par le maintien dans l’activité, ajusté et accompagné. “Il s’agit là d’alternatives majeures au reclassement à renforcer pour le bien et la santé des agents”, poursuit-il. Pour autant, il ne faut pas perdre de vue que toutes les mesures préventives n’empêcheront pas la survenue de maladies ou d’accidents, mais l’enjeu est de construire une nouvelle culture du reclassement, au-delà des dispositifs normatifs et des urgences quotidiennes.
Déverrouiller les règles bloquantes
Parmi les pistes et axes d’amélioration, l’Observatoire suggère par exemple d’acquérir collectivement le réflexe du signalement précoce et d’accélérer la mise en place des aménagements de poste, comme un temps partiel thérapeutique. Avec l’aide de centre de gestion, il s’agit aussi de construire un outil de pilotage stratégique avec un suivi des arrêts, un système d’alerte, mais également de déverrouiller les règles bloquant l’accès aux formations pour les agents en arrêt maladie ou engagés dans une procédure de déclaration d’inaptitude.
Il est aussi préconisé d’informer l’agent de manière proactive et personnalisée, pour rendre plus lisibles les règles des différents types d’arrêts et l’alerter sur les risques liés à l’enchaînement des arrêts, par exemple. Autre recommandation : mieux sécuriser l’intégration de l’agent dans son nouveau poste, travailler autour de la sécurisation des remplacements en veillant à atténuer l’“effet boule de neige” du report de charge. La prévention constitue également la pierre angulaire d’un changement de culture autour de la prise en charge des reclassements, tout comme les reconversions anticipées ciblant plus particulièrement les agents les plus exposés.
ACTEURS PUBLICS : article publie le jeudi 29 novembre 2024 & Marie Malaterre
Comment se déroule une procédure de reclassement
La procédure de reclassement concerne les fonctionnaires reconnus inaptes à l’exercice de leurs fonctions, mais pas à toute fonction. Elle s’applique aux fonctionnaires des trois versants de la fonction publique, que cette inaptitude soit temporaire ou définitive. Cette procédure intervient lorsqu’il n’est pas possible d’aménager les fonctions ou de procéder à une nouvelle affectation sur des fonctions correspondant au grade de l’agent concerné et compatibles avec son état de santé. Dans le détail, la procédure de reclassement s’ouvre par une période de préparation au reclassement, d’une durée maximale d’un an, destinée à accompagner l’agent dans la construction de son projet de réorientation professionnelle, grâce notamment à des formations, des stages d’immersion ou tout dispositif lui permettant d’envisager une nouvelle carrière.
Pendant cette période, le fonctionnaire est en position d’activité et continue de percevoir son traitement et les primes afférentes à son poste et à son grade. Le reclassement s’effectue généralement par la voie du détachement, éventuellement dans un autre versant de la fonction publique puis, le cas échéant, par intégration dans un autre corps ou cadre d’emplois de fonctionnaires.
Semaine de vérité pour les syndicats de la fonction publique
Les agents publics vont-ils se mobiliser en masse contre les dernières annonces du gouvernement en matière de fonction publique ? Réponse cette semaine avec l’appel à la grève lancé pour ce jeudi 5 décembre par 7 des 8 syndicats du secteur public : la CGT, la CFDT, la FSU, l’Unsa, Solidaires, la FA-FP et la CFE-CGC. Force ouvrière a appelé quant à elle à 3 jours de grève reconductible à compter du 10 décembre, dans une logique de “convergence des luttes avec les cheminots”, qui ont lancé leur préavis à partir du 11.
Cet appel à la mobilisation a suivi les annonces du ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian, sur la hausse de 1 à 3 du nombre de jours de carence et l’abaissement de 100 à 90 % du taux de remplacement de la rémunération des agents publics durant leurs arrêts maladie de courte durée. Les syndicats s’opposent aussi, notamment, au gel des salaires ou encore au non-versement de la Gipa, la prime de pouvoir d’achat des agents publics.
Le premier enjeu, pour les syndicats, résidera dans la réussite ou non de leur mobilisation, alors que leurs précédents appels à la grève sur la question des salaires n’ont pas rassemblé les foules dans la fonction publique. Autre enjeu pour les représentants des agents publics, celui du maintien de l’unité syndicale au lendemain de la grève du 5 décembre. Reste que ceux-ci pourraient se retrouver, dès ce début de semaine, dans une situation pour le moins baroque : dans l’hypothèse où le gouvernement Barnier serait censuré, les mesures contestées se verraient frappées de caducité. Maintiendraient-ils alors leur appel à la grève ? Et si oui, avec quels mots d’ordre ?
ACTEURS PUBLICS : Article publié le lundi 02 décembre 2024 & Bastien SCORDIA