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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

GESTION PUBLIC

29 Janvier 2025 , Rédigé par FO Services Publics 51

Pierre Moscovici esquisse de premiers ajustements du régime de responsabilité des gestionnaires publics

Instauré en 2023, le nouveau régime de responsabilité des gestionnaires publics “ressemble à ce que nous souhaitons mais avec des restrictions importantes”, estime le Premier président de la Cour des comptes, se référant notamment à l’appréciation du préjudice financier et surtout de son caractère significatif, qui doit désormais être établi pour que la responsabilité soit engagée. Selon Pierre Moscovici, le régime devra être ajusté dans les prochaines années.

Faudra-t-il ajuster certains points concernant le nouveau régime de responsabilité financière des gestionnaires publics ? Probablement, a répondu le Premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, à l'occasion de ses vœux à la presse, ce jeudi 16 janvier. Instaurée en 2023, cette réforme a mis en place un régime unifié de responsabilité des ordonnateurs et des comptables avec une Rue Cambon compétente en première instance via sa nouvelle “chambre du contentieux”. 

La responsabilité des gestionnaires publics ne peut désormais être engagée que pour les fautes les plus graves, à condition que le préjudice financier soit jugé “significatif”. Un critère qui, selon certains, aurait réduit les probabilités d'engagement de la responsabilité des gestionnaires publics. 

Pierre Moscovici n'a pas manqué de saluer une nouvelle fois cette réforme. Le système précédent était “compliqué”, a-t-il rappelé, avec d‘un côté la Cour des comptes qui jugeait les comptables publics et de l’autre, la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) jugeant les ordonnateurs. “Ce système était fatigué et il fallait le rénover”, a-t-il développé.

Sa mise en œuvre a constitué “une belle bataille, notamment avec nos grands amis des finances”, a ironisé Pierre Moscovici, avant de poursuivre : “Nous avons quand même gagné la bataille !"  

Une histoire qui reste à écrire

Pour autant, si “les fondations ont été posées”, il faut encore “écrire l'histoire” de ce régime de responsabilité, a reconnu le Premier président de la Cour des comptes. “Il ressemble à ce que nous souhaitons mais avec des restrictions importantes”, a-t-il expliqué, faisant référence au “champ des infractions”, à l'appréciation du préjudice financier et surtout de son caractère significatif, mais aussi au champ des sanctions pouvant être infligées aux gestionnaires publics. 

Responsabilité des managers : le premier arrêt de la Cour d’appel financière n’apaise pas les craintes

Certes, a expliqué Pierre Moscovici, le bilan que l’on peut tirer à ce jour du nouveau régime “est loin d'être définitifil monte en puissanceil est très identifié par les ordonnateurs et les comptables et extrêmement dissuasif”. Mais à ses yeux, il demeure des “trous dans la raquette”“Il faudra y revenir avec le temps”, a-t-il souligné, jugeant opportun de retravailler éventuellement sur les contours du “préjudice financier significatif”, sur le quantum des peines ou sur les délais de prescription. Le Premier président partage en cela le constat fait par l'ex-procureur général Louis Gautier en octobre dernier, avant qu'il ne quitte ses fonctions. 

“Il serait inopportun de tout bousculer à présent, alors que le régime est en phase d’installation, à peine au début d’un processus de cristallisation. Il faut laisser le droit prétorien se développer, s’ancrer, et donc ne pas aller plus vite que la musique, avait indiqué ce dernier dans nos colonnes. En revanche, le moment venu, c’est-à-dire à l’horizon de trois à quatre ans, au vu des attentes et des résultats, il me semble qu’un retour au Parlement peut être bienvenu.”

Un champ d’infractions à élargir, des sanctions à affiner  

Louis Gautier suggérait alors plusieurs pistes de réforme, comme l'élargissement du champ des infractions visées par le nouveau régime. L'ancien procureur général proposait ainsi notamment de soumettre à la chambre du contentieux de la Cour les manquements des gestionnaires aux règles de la commande publique. Il proposait aussi de confier au juge financier une compétence s’agissant des atteintes au droit à l'environnement : “Le juge pourrait devenir compétent pour sanctionner un gestionnaire public qui, en violation du code de l’environnement et par ses agissements, a causé un préjudice significatif, par exemple une dépense de dépollution ou la démolition d’un ouvrage irrégulier.” 

Louis Gautier proposait aussi d'ouvrir le débat sur la possibilité de prévoir des interdictions professionnelles pour les gestionnaires condamnés ou encore de se pencher sur le barème des amendes qui leur est applicable. Les peines sont en effet uniquement pécuniaires aujourd'hui. “On ne peut pas traiter sur un même pied un directeur d’entreprise publique ayant commis une grave irrégularité financière et un responsable bénévole d’une association tenant mal à jour sa comptabilité ou un élu d’une petite commune reconnu gestionnaire de fait dans une affaire portant sur quelques milliers d’euros”, expliquait-il. Autant de réflexions aujourd'hui partagées par Pierre Moscovici et qui devraient être évoquées dans le cadre des “missions d'urgence pour la justice” lancées en novembre dernier par l’ex-garde des Sceaux Didier Migaud. 

Louis Gautier : “Il est nécessaire que l’évaluation des gestionnaires publics se renforce”

L'une de ces missions, dont l'existence vient d'être entérinée par le nouveau ministre de la Justice, Gérald Darmanin, est consacrée au rôle de la justice. Elle “devra proposer les voies et moyens de nature à simplifier la vie du justiciable, à rendre plus efficiente l’action de la justice, à poursuivre et amplifier le recours aux voies amiables ou encore à mener une réflexion sur l’orientation, l’aiguillage et la répartition des contentieux présentant des aspects répressifs, administratifs et financiers”, explique la Place Vendôme. Parmi ses membres, Louis Gautier, qui pourra profiter de sa présence pour pousser ses propositions d'évolution du régime de responsabilité financière des gestionnaires publics. 

ACTEURS PUBLICS : article publie le jeudi 16 janvier 2025 & Bastien Scordia

 

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