EVOLUTION FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE
INSTANCE DE DIALOGUE DE LA CONFÉRENCE NATIONALE DES TERRITOIRES
Evolution de la FPT : les premières pistes de la mission Dussopt-Laurent
Leurs premières propositions d’évolution de la fonction publique territoriale étaient très attendues. Le secrétaire d'Etat, Olivier Dussopt, et le président du CSFPT, Philippe Laurent, ont présenté les orientations de travail le 4 juillet lors de la réunion de l’instance de dialogue de la conférence nationale des territoires, à Matignon.
C’est en comité plus restreint que prévu que l’instance de dialogue de la conférence nationale des territoires s’est tenue, mercredi 4 juillet, à Matignon (1). La veille, l’association des maires de France (AMF), l’Assemblée des départements de France (ADF) et Régions de France avaient en effet annoncé qu’ils boycotteraient l’événement du 12 juillet prochain, et donc ce rendez-vous préalable.
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Un « exercice singulier » donc, comme le rapportent des représentants d’associations d’élus présents, pour lequel le secrétaire général de l’AMF, Philippe Laurent, était tout de même présent. Mais au seul titre de président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT).
En décembre dernier, lors de la Conférence nationale des territoires de Cahors, le Premier ministre lui avait confié une mission conjointe avec le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Action et des comptes publics, Olivier Dussopt sur « la modernisation de la fonction publique territoriale ».
Avancées à petits pas
La réunion de l’instance de dialogue des territoires de ce 4 juillet était l’occasion de faire un point d’étape et d’échanger sur les premières propositions de « modernisation ». Le président du Conseil Sup’ a formulé plusieurs pistes d’évolution et d’attractivité de la FPT qu’il qualifie de « réalistes ». D’ailleurs, l’APVF, France Urbaine et l’AMRF se disent en phase avec elles.
A l’issue de la rencontre, Philippe Laurent assurait que la réunion s’était « globalement bien passée » et que les choses « avançaient », même si c’était par « petits pas »…
Attachement au statut
Le secrétaire d’Etat a commencé par tirer les « premiers enseignements de cette concertation » avec les acteurs du monde local (2). « De manière unanime, toutes les associations d’élus et tous les employeurs territoriaux demandent plus de souplesse dans la gestion des ressources humaines et tous ont rappelé leur attachement au statut de la fonction publique », a -t-il constaté, selon le texte de son intervention que la Gazette des communes s’est procuré.
Un statut d’ailleurs plus souple que certains ne veulent le dire et qui fournit un ensemble de garanties profitables.
Un point que ne peut que partager le président du Conseil sup’ tout en appuyant sur les possibilités déjà existantes : « Je veux donc ici réaffirmer l’attachement des employeurs locaux au statut. Statut d’ailleurs plus souple que certains ne veulent le dire et qui fournit un ensemble de garanties profitables aussi bien aux employeurs qu’aux agents et, en même temps, de larges possibilités de construire des outils de management des ressources humaines », a-t-il ainsi explicité.
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Exit la dé-corrélation
Autre constat dressé par Olivier Dussopt : « le refus de la décorrélation » ! Le secrétaire d’Etat semble ainsi prendre acte d’un vœu largement partagé entre employeurs territoriaux, organisations syndicales, et observateurs avertis : « Alors que certains élus locaux avaient exprimé, lors de la campagne pour l’élection présidentielle, leur difficulté à gérer leur collectivité dans de bonnes conditions – notamment parce qu’en matière de gestion des ressources humaines, les décisions prises pour la fonction publique d’Etat impactaient aussi la fonction publique territoriale – il ressort de tous nos échanges et entretiens bilatéraux qu’aucun d’entre-vous ne souhaitent aujourd’hui une décorrélation », a-t-il reconnu.
La suite des propositions s’inscrit d’une part dans la réflexion plus globale sur la fonction publique et les quatre chantiers de réflexions ouverts par le gouvernement, et d’autre part dans des problématiques plus spécifiques à la territoriale.
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Vers la fusion des CT et des CHSCT
Le gouvernement confirme sa volonté de « simplifier » les instances de dialogue social en fusionnant comités techniques (CT) et comités d’hygiène de santé et conditions de travail (CHSCT). Partant de là, Philippe Laurent souligne l’importance, pour les employeurs territoriaux, de maintenir un » dialogue social de proximité en matière d’organisation du travail, de santé, d’hygiène, de qualité de vie au travail ».
Il devient alors « essentiel » pour le président du CSFPT, « d’imposer aux collectivités une formation spécialisée Santé et Sécurité au Travail (SST) pour que ces sujets puissent être obligatoirement et régulièrement abordés, « en présence de spécialistes ».
C’est l’idée que semble avoir retenu la DGAFP lors de la dernière réunion du chantier « dialogue social », vendredi 29 juin, dans le cadre de la concertation « refonder le contrat social avec les agents publics »…
S’agissant de l’organisation des commissions administratives paritaires, la piste de la suppression des « groupes hiérarchiques », « source de lourdeur administrative » a été évoquée.
Le président du CSFPT a par ailleurs confirmé la création officielle, au début de l’automne prochain, de la « coordination des employeurs territoriaux », pour mieux peser dans les débats au niveau national.
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Développer les « Contrats de mission »
L’idée des élus consistant à créer des « contrats de mission » semble être considérée par le gouvernement, qui l’imagine pour les trois catégories A, B et C. Ces contrats pourraient bénéficier aux collectivités dont la strate démographique ne permet pas actuellement le détachement de cadres supérieurs sur emploi permanent (catégories B et C) dans une autre collectivité.
La durée du contrat devrait être limitée et liée à un projet (d’équipement, de développement ou encore d’urbanisme) et des garanties devraient être prévues pour l’agent, comme pour la collectivité d’accueil et celle d’origine.
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Au-delà des contrats de mission, Olivier Dussopt propose aussi un recours aux contractuels élargi aux emplois permanents de catégorie B et C, quand Philippe Laurent préconise plutôt de revoir les conditions de recrutements pour certaines filières en tension.
Mais il est un point de désaccord qui reste profond entre le président du Conseil Sup’ et le secrétaire d’Etat en la question de l’ouverture des postes de directions générales des collectivités aux contractuels.
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Un plancher pour le complément indemnitaire annuel (CIA)
En matière de politique salariale, « il faut impérativement savoir d’où l’on part avant de déterminer où l’on veut aller », selon Philippe Laurent. Un bilan exhaustif des divers dispositifs, ainsi que leur coût, devrait être réalisé.
Quant aux instruments d’évaluation, ils doivent être adaptés, et la formation des cadres qui en ont la charge, renforcée. Par ailleurs, définir le « mérite », devrait pouvoir se faire collectivement, au niveau de l’équipe ou d’un collectif de travail restreint sur la base de critères objectifs partagés.
Les employeurs et Olivier Dussopt s’accordent sur une piste pour individualiser la rémunération au mérite des agents. A savoir instaurer un plancher – entre 10 et 15% – pour la part du complément individuel annuel, l’une des composantes du régime indemnitaire actuel. En outre, le gouvernement s’intéresse à la possibilité de relever le plafond de la prime d’intéressement collectif.
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Un accompagnement renforcé des évolutions de carrières
Olivier Dussopt et employeurs s’accordent à dire qu’il faut un accompagnement renforcé en matière d’évolution de carrière. Cela étant, les méthodes imaginées divergent.
« Si on veut développer la mobilité, il faut la prévoir, l’organiser et la piloter au bon niveau géographique », soutient le président du Conseil sup’. Parce que pour les agents de catégorie B ou C, le bassin d’emploi reste départemental ou régional, c’est à ces niveaux qu’il faut une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEEC).
L’instauration effective de « conférences régionales de l’emploi public » obligatoires, associant les employeurs des trois versants et permettant des bilans réguliers des besoins, pourrait être une première étape. Une ou plusieurs « bourse de l’emploi », ne suffisent pas selon Philippe Laurent.
Côté gouvernement, on mise toujours sur l’opportunité d’étendre l’indemnité de départ volontaire (IDV) jusqu’à deux ans avant l’âge minimum de départ en retraite. Et sur la possibilité de cumul avec l’allocation chômage afin de rendre l’IDV « nettement plus attractive ».
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En outre, toujours selon le gouvernement, une réflexion doit être engagée en lien avec les employeurs territoriaux sur le déroulé de carrière des agents, les motifs de licenciement et la possibilité, sous certaines conditions, de procéder à des ruptures conventionnelles. Un levier que proposait d’actionner également la sénatrice Catherine di Folco dans son rapport sur l’avenit de la fonction publique territoriale.
Retour à la « norme » des 1607 heures annuelles
Enfin, le secrétaire d’État en charge de la fonction publique a appelé les employeurs à être « cohérents et ambitieux » concernant le temps de travail des agents et le retour à la « norme » des 1607 heures annuelles. Une volonté partagée par l’auteur du rapport sur le temps de travail dans la fonction publique(mai 2016).
Mais quand le premier appelle à la « remise en question des régimes dérogatoires dans un délai à convenir d’ici 2022 », le second préfère parler de délibération obligatoire et régulière, par chaque exécutif, de l’actualisation des protocoles concernant le temps et l’organisation du travail.
L’accord est plus parlant sur l’harmonisation des autorisations spéciales d’absence (ASA), pour les congés familiaux notamment.
Prendre en charge le « risque maladie »
Parmi les autres préoccupations évoquées par Philippe Laurent, le « risque maladie ». Les collectivités seraient selon lui « écartelées » entre le coût croissant des contrats d’assurance et la montée en puissance des difficultés de gestion (contrôle, prévention…) de la maladie de leurs personnels. La prise en charge du risque santé par un organisme ad hoc commun serait ainsi une piste à creuser.
D’autres réflexions seraient enfin à mener sur la révision de la nomenclature des quotas de nomination après concours ou examens professionnels ou encore les emplois à temps non complet.
La Gazette des communes : Article publié le mercredi 04 juillet 2018 & Bénédicte Rallu Claire Boulland
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