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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

CONTRACTUELS

19 Mars 2019 , Rédigé par FO Services Publics 51

Primo recrutement des contractuels en CDI 

Lame de fond ou révolution de pacotille ?

En plus d’élargir les possibilités de recours aux contractuels dans le secteur public, le gouvernement souhaite, dans le cadre du projet de loi de réforme de la fonction publique, étendre le primo recrutement en CDI des agents de l’État. Une mesure qui doit encore faire ses preuves et que les ministères doivent s’approprier.

Se dirige-t-on vers une concurrence beaucoup plus forte entre les fonctionnaires titulaires et les contractuels ? Nichée au fin fond du volet “Contractuels” du projet de loi de réforme de la fonction publique, une disposition prévoit d’étendre sensiblement, dans la fonction publique d’État, la possibilité de recruter directement les agents contractuels en contrat à durée indéterminée (CDI).

Introduite à titre expérimental par la loi dite Sauvadet de 2012, puis généralisée par la loi de 2016 relative aux droits et obligations des fonctionnaires, cette mesure d’élargissement “favorisera le recrutement et la fidélisation de profils compétents et recherchés et permettra de faire face aux enjeux d’attractivité dans certains territoires ou pour certains métiers”, explique le gouvernement dans l’exposé des motifs de son projet de loi. Pour certains représentants du personnel, en revanche, il s’agit d’un dévoiement en bonne et due forme du statut et du recrutement titulaire. “Le train de la dualisation de la fonction publique était en marche depuis la loi de 2012, elle se voit aujourd’hui accélérée”, explique Aurélie Peyrin, sociologue et maître de conférences à l’université d’Aix-Marseille.  

Plus seulement la catégorie A

À l’heure actuelle, les administrations d’État étaient autorisées à recourir à ce primo recrutement en CDI uniquement pour pourvoir des emplois permanents correspondant à des missions pour lesquelles il n’existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d’assurer les fonctions correspondantes.

Désormais, explique le projet de loi, cette possibilité sera ouverte pour les agents contractuels recrutés sur les emplois “lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient”. Et ce notamment lorsqu’il s’agit de fonctions nécessitant des compétences techniques spécialisées ou nouvelles et lorsque la procédure de recrutement d’un titulaire s’est révélée infructueuse. Les administrations pourront également recruter directement en CDI sur des emplois dont les fonctions ne nécessitent pas une formation statutaire obligatoire à l’entrée dans le métier, préalable à la titularisation de l’agent.

Pour rappel, jusqu’à ce jour, le recrutement de contractuels sur ce type d’emplois était ouvert uniquement aux agents de catégorie A. Une disposition sur laquelle le projet de loi de réforme de la fonction publique revient en élargissant ce recours à l’ensemble des catégories hiérarchiques [cliquez ici pour consulter notre article sur le sujet].

Règles de gestion en question

Si l’élargissement de ce primo recrutement en CDI constitue bien entendu un levier managérial de taille pour les employeurs publics et une condition sine qua non d’attractivité des cadres (du privé ou non), en compensant l’absence d’attractivité salariale, il faut encore que cette mesure fasse ses preuves. “Avoir des outils, c’est une chose, les mettre en œuvre, c’est une autre paire de manches”, explique une cheville ouvrière de la réforme qui ne croit pas forcément à un “grand soir” en la matière. “Tout dépend de la mise en œuvre qu’en feront les départements ministériels dans leurs pratiques de gestion”, ajoute-t-il.

Là comme dans d’autres domaines, il y aura “la possibilité d’un côté et les règles de gestion que se donneront les ministères de l’autre, lesquelles ont pour effet systématique de faire perdre leur effet à de nombreuses mesures”, abonde un observateur en pointant notamment les règles de gestion fixées après négociation avec les organisations syndicales, qui “empêchent de fait tout recrutement de cette nature”. “Comme souvent en matière RH dans la fonction publique, ce n’est pas le soi-disant statut monolithique qui empêche la souplesse ou l’agilité, ce sont les règles que s’imposent les ministères qui freinent les évolutions”, ajoute ce dernier.

Métiers en tension ou missions spécialisées

Un bilan de l’expérimentation de ce primo recrutement, daté d’octobre 2015, par la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), fait en effet état d’une utilisation prudente et sélective de cette possibilité. Sur la base des résultats d’une enquête sur cette expérimentation réalisée en octobre 2014, la DGAFP indiquait notamment que la plupart des ministères n’avaient pas élaboré à cette date de doctrine pour la mise en œuvre de ce mécanisme, dont l’utilisation est restée exceptionnelle après un examen au cas par cas. Au total, à cette date, 300 recrutements étaient intervenus dans ce cadre, notamment pour des métiers en tension (médecins de prévention, ingénieurs de prévention, psychologues de la police nationale) ou sur des missions spécialisées telles que l’informatique.  

Un autre facteur bloquant la survenue de tout “grand soir” en la matière est aussi mis en avant par les observateurs : le caractère non obligatoire de ce primo recrutement en CDI. Les administrations de l’État auront en effet toujours la possibilité de recruter en CDD puis, dans certains cas, de proposer un renouvellement en CDI aux contractuels recrutés sur les mêmes emplois qui sont aujourd’hui ouverts au primo recrutement.

ACTEURS PUBLICS : ARTICLE PUBLIE LE JEUDI 7 MARS 2019 & BASTIEN SCORDIA

 

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