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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

DEVOIR DE RESERVE

22 Juin 2023 , Rédigé par FO Services Publics 51

Les fonctionnaires peuvent écrire des livres… mais sous certaines conditions

Le code général de la fonction publique permet aux agents publics de “produire librement des œuvres de l’esprit (…) sans autorisation ou conditions préalables”, rappelle le gouvernement dans une réponse à la question écrite d’une sénatrice. Les agents demeurent néanmoins responsables des propos qu’ils tiennent publiquement et soumis au secret professionnel ainsi qu’à une obligation de discrétion professionnelle. 

L'obligation de réserve à laquelle sont tenus les fonctionnaires les empêche-t-elle d'écrire des livres puis de les publier ? Non, vient de répondre le gouvernement dans une réponse à la question écrite d'une sénatrice qui s'interrogeait sur la possibilité, pour les membres du gouvernement comme pour les agents publics, de produire des “œuvres de l’esprit”. 

La parlementaire, la centriste Nathalie Goulet, avait en effet interpellé l’exécutif sur de récents ouvrages signés tant par des membres du gouvernement que par des fonctionnaires “écrivant ès qualités”. Aussi se demandait-elle “s’il ne serait pas approprié de rappeler qu’il est contraire aux usages de publier dans l’exercice de leurs fonctions”. 

La sénatrice citait notamment le cas d’Aurélien Rousseau, le directeur de cabinet de la Première ministre, Élisabeth Borne (et aujourd’hui sur le départ), qui a récemment publié un ouvrage sur son expérience de la crise sanitaire à la tête de l’agence régionale de santé d’Île-de-France.  

Un dircab’, des ambassadeurs, un préfet  

Elle citait aussi les livres publiés par des ambassadeurs “dont l'un dans un pays en guerre”, à savoir l’ambassadeur de France en Ukraine, Étienne de Poncins, et par une directrice d’établissement pénitentiaire, Christelle Rotach, ainsi que par un ex-préfet de police, Didier Lallement, appelés à d’autres fonctions. 

Les réseaux sociaux à l’épreuve du devoir de réserve des agents publics

“Ont-ils sollicité au préalable une autorisation hiérarchique et si oui, l’ont-ils obtenue ? Car tout fonctionnaire est astreint à l’obligation de réserve dans le cadre de ses fonctions”, interrogeait ainsi Nathalie Goulet. Et d’ajouter : “Ne conviendrait-il pas de rappeler aux membres du gouvernement comme à ceux de la fonction publique l’impérative nécessité de discrétion et de réserve ?” 

“Je ne puis que redire ma décision de ne pas écrire relativement à des questions que je ne connais qu’à raison de fonctions mêmes”, écrivait le diplomate Philippe Berthelot, secrétaire général du Quai d’Orsay de 1920 à 1933. “Loin paraît (cette) époque”, estime aujourd’hui Nathalie Goulet.  

Pas d’obstacle à la production d’œuvres de l’esprit

Les règles législatives et réglementaires comme la jurisprudence sont pourtant claires, rappelle le gouvernement dans sa réponse, publiée le 1er juin. S’agissant précisément des membres du gouvernement, l’exercice de fonctions ministérielles “ne fait pas obstacle à la production d’œuvres de l’esprit”, explique l’exécutif en précisant que les ouvrages écrits par les ministres “ne sauraient porter sur des éléments couverts par le secret des délibérations du gouvernement”. 

Pour les agents publics, le code général de la fonction publique leur interdit certes d’exercer, à titre professionnel, une activité privée lucrative “de quelque nature que ce soit”, sous réserve néanmoins de certaines dérogations énoncées. C’est le cas notamment de la dérogation prévue à l’article L. 123-2 de ce code qui permet ainsi aux agents publics de “produire librement, sans autorisation ou condition préalable, des œuvres de l’esprit” (livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques).

Cette production d’œuvres de l’esprit doit malgré tout s’exercer en respectant le secret professionnel auquel sont astreints les agents publics, ainsi que l’obligation de discrétion professionnelle “pour tous les faits, informations ou documents dont les agents ont connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions ». « Le respect de ces obligations s’impose donc explicitement aux agents publics produisant une œuvre de l’esprit”, confirme ainsi le gouvernement.  

Les agents responsables de leurs propos publics 

Quant au contenu des opinions couchées sur le papier, “l’agent public peut parler et écrire librement, et l’administration ne saurait exiger, quels que soient les sujets abordés, qu’il soumette à son supérieur hiérarchique, préalablement à leur publication, des articles ou ouvrages qu’il aurait écrits”, précise l’exécutif en se référant à une décision du Conseil d’État de décembre 2000. L’agent public concerné “demeure néanmoins responsable des propos qu’il tient publiquement”.  

Il est aussi “soumis au respect de l’obligation de réserve, d’origine jurisprudentielle, qui limite les modalités d’expression des opinions personnelles”. Manière “d’éviter que des prises de position publiques de fonctionnaires ne portent atteinte à l’intérêt du service, à sa neutralité, ainsi qu’au bon fonctionnement de l’administration”, développe le gouvernement. Aussi, si l’agent public rompt son obligation de réserve, celui-ci s’expose-t-il à des poursuites disciplinaires. Par ailleurs, l’utilisation d’un pseudonyme “ne l’exonère aucunement de cette responsabilité”, comme précisé par le Conseil d’État dans une décision de juin 2018.  

acteurs publics : article publie le jeudi 08 juin 2023 & BASTIEN SCORDIA

 

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