SERVICES PUBLICS
Décentralisation, déconcentration, ce qu’il faut retenir des annonces présidentielles
Jeudi 25 avril, lors de sa conférence de presse post grand débat, le chef de l’État a annoncé plusieurs mesures visant à rapprocher les services publics des citoyens. Passage en revue.
Réformer l’organisation de la République pour rapprocher les services publics des citoyens. C’est le souhait qu’a exprimé le Président de la République, Emmanuel Macron, jeudi 25 avril lors de sa conférence de presse sur les suites données par l’exécutif au grand débat national.
"Ce qui s’est exprimé, c’est un besoin de proximité et d’enracinement de l’action publique, que nous devons conduire, a-t-il indiqué. J’ai pleinement conscience que la politique que nous avons parfois menée a été perçue comme lointaine, parfois trop froide, venant de Paris et donc technocratique".
Nouvel acte de décentralisation
Pour y remédier, le chef de l’État a notamment annoncé son intention d’initier un "nouvel acte de décentralisation adapté à chaque territoire" dont l’aboutissement est prévu pour le "premier trimestre 2020". Un nouvel acte qui prendra la forme d’un projet de loi que le gouvernement devrait déposer "au quatrième trimestre 2019", indique-t-on au ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales. Celui-ci doit en particulier porter sur des "politiques de la vie quotidienne" telles que le logement, les transports ou la transition écologique "pour garantir des décisions prises au plus près du terrain".
Selon Emmanuel Macron, ce nouvel acte devra s’appuyer sur trois principes : la responsabilité, la lisibilité et le financement. "Quand je regarde nos décentralisations passées, elles sont tout sauf claires et elles n’ont pas permis de faire de véritables économies ni d’avoir une culture de la responsabilité", a-t-il expliqué. Et d’ajouter : "On a souvent transféré des bouts de compétences avec des financements qui allaient avec (mais) l’État a gardé une partie de ces compétences, ce qui créé un imbroglio terrible et surtout on n'a jamais transféré la responsabilité démocratique qui va avec ces compétences". Résultat selon le chef de l’État : quand les ennuis sont là, seule la responsabilité de l’État est engagée.
Une "vraie République décentralisée, c’est des compétences claires que l’on transfère totalement en supprimant les doublons, on transfère clairement les financements et la responsabilité", a-t-il abondé en précisant que ce nouvel acte de décentralisation s’accompagnera aussi du développement du principe de différenciation entre les collectivités. Un axe qui sera, comme prévu, acté dans la future réforme constitutionnelle.
Plus grande déconcentration
Autre voie avancée par le locataire de l’Élysée pour rapprocher les services publics des citoyens : l’adaptation de l’État au travers notamment d’une plus grande déconcentration, elle-même source d’économies. L’État "doit lui-même repenser son action sur le terrain en cessant la fermeture des services publics et en ayant une autre approche de sa présence dans les territoires", a expliqué Emmanuel Macron. "Nous avons trop de monde à Paris, je l’ai souvent dit lors du grand débat, trop de monde qui prend des décisions ou décide des règles sans jamais voir les problèmes des gens", a-t-il poursuivi.
L’occasion pour le chef de l’État de rappeler sa volonté, maintes fois affirmée, de "remettre plus de fonctionnaires sur le terrain, qui apportent des solutions contrairement à la tendance depuis plusieurs décennies et que l'on supprime plus de postes en administration centrale".
En ce sens, il a annoncé que le Premier ministre, Édouard Philippe, aura à présenter "dès le mois prochain" une profonde réorganisation de l'administration qui visera à donner "plus de pouvoir et de responsabilités au terrain et à ceux qui sont au contact de ces réalités". Directement visés, les préfets autour desquels le Président de la République souhaite "une plus grande clarté avec des services de l’État qui soient coordonnés".
Des maisons dans chaque canton d’ici 2022
Opérationnellement, le chef de l’État souhaite qu’il n’y ait plus de fermetures d’écoles ou d’hôpitaux d’ici à la fin du quinquennat ou encore assurer pour l’ensemble des citoyens un accès aux services publics "en moins de trente minutes".
Lors de sa conférence de presse, il a également indiqué son intention de voir d’ici 2022, dans chaque canton, un endroit, "pour tous les citoyens où l’on puisse trouver réponse aux difficultés qui peuvent être rencontrées". Des structures dénommées "France services", sur le modèle des actuelles Maisons de service au public (MSAP).
ACTEURS PUBLICS : ARTICLE PUBLIE LE 26 AVRIL 2019 & BASTIEN SCORDIA
Les élus locaux attendent une "clarification"
Dans un communiqué commun au nom de "Territoires Unis", le président de l'Association des maires de France (AMF), François Baroin, de l'Assemblée des départements de France (ADF), Dominique Bussereau et de Régions de France, Hervé Morin ont réclamé une "clarification" autour de la mise en oeuvre du nouvel acte de décentralisation souhaité par le Président de la République. Ces associations avaient plaidé, début mars, pour un nouveau choc de décentralisation [cliquez ici pour consulter notre artcile sur le sujet]. "Parce que nous avons été maintes fois déçus par la réalité des actes, nous attendons à présent de voir si ces principes seront bien à l'oeuvre rapidement, expliquent-ils. Le discours présidentiel contient plusieurs contradictions qui risquent de recréer des doublons en opposition au principe de responsabilité mis en avant par ailleurs". Et de citer notamment l'exemple des maisons "France services" qui "visent à répondre à un objectif de proximité sans prendre en considération les actions des communes en la matière", celui des politiques de solidarité et de santé "qui se superposent aux responsabilités des départements" et celui du plan pour le travail, l'emploi et la formation "qui chevauche" les compétences des régions.
Les représentants de ces trois associations d'élus souhaitent par ailleurs que l'exécutif se montre "plus respectueux des exécutifs locaux" et "soucieux de réellement co-construire des solutions innovantes répondant aux besoins (des) compatriotes". Pour rappel, depuis le début du quinquennat, les relations sont particulièrement tendues entre le gouvernement et ces trois associations d'élus, ces dernières n'ayant pas manqué de boycotter la Conférence nationale des territoires pour marquer leur opposition à la politique de l'exécutif à l'égard des territoires.