DIALOGUE SOCIAL
À quoi les nouvelles instances de dialogue social de la fonction publique vont-elles ressembler ?
Deux décrets d’application de la loi de réforme de la fonction publique, pour le versant État, ont été publiés au Journal officiel dimanche 22 novembre. Le premier est relatif à la mise en place des comités sociaux, nés de la fusion des comités techniques et des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Le second précise quant à lui la nouvelle architecture des commissions administratives paritaires (CAP), dont les attributions ont été sensiblement réduites.
La réforme des instances de dialogue social de la fonction publique se précise. Vivement critiquée par les organisations syndicales, la réforme de leur architecture vient être détaillée par 2 décrets publiés au Journal officiel du dimanche 22 novembre. Ces textes sont pris en application de la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 et concernent précisément la fonction publique d’État.
La déclinaison pour les deux autres versants, la territoriale et l’hospitalère, interviendra prochainement. Les objectifs de l’exécutif étaient multiples avec cette réforme des instances de dialogue social : remédier à l’éclatement des instances notamment, mais aussi à la lourdeur des procédures.
Place aux “comités sociaux d’administration” fin 2022
Le premier de ces décrets est relatif à la mise en œuvre des comités sociaux d’administration, nés de la fusion des comités techniques (CT) et des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).
De nouvelles instances qui seront installées à l’occasion des prochaines élections professionnelles de la fonction publique, à savoir fin 2022. Le décret précise ainsi la cartographie future de ces comités sociaux, leur composition, leurs compétences, mais aussi l’articulation de leurs attributions avec celle de la “formation spécialisée” en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail.
Pour pallier la suppression des CHSCT, la loi de 2019 a en effet prévu la création de telles formations spécialisées au sein des futurs comités sociaux administration. Celles-ci seront ainsi obligatoires à partir d’un seuil d’effectifs fixé à 200 agents. En-deçà de ce seuil, néanmoins, des formations spécialisées pourront être créées en cas d’existence de risques particuliers.
CAP par catégories hiérarchiques
Le second décret publié au Journal officiel précise quant à lui le deuxième axe de la réforme des instances de dialogue social initiée par l’exécutif, à savoir celle des commissions administratives paritaires (CAP). La loi de 2019, en effet, a profondément remanié et réduit le champ de compétences de ces instances de représentation des personnels, traitant des sujets relatifs aux carrières et aux situations individuelles. Ce qu’un premier décret de novembre 2019 avait acté.
La redéfinition des compétences de ces CAP s’organisait précisément en 3 étapes : depuis le 1er janvier 2020, suppression de l’avis de la CAP pour les décisions individuelles relatives à la mutation, au détachement, à l’intégration et à la réintégration après détachement et à la mise en disponibilité ; au 1er janvier 2021, suppression de l’avis de la CAP en matière d’avancement, de promotion, de titularisation, d’acceptation de démission ; et fin 2022, refonte de l’architecture et des règles de fonctionnement des CAP. Une nouvelle architecture et de nouvelles attributions que vient donc préciser le décret publié ce 22 novembre.
Outre le recentrage des attributions des CAP (centrées désormais uniquement sur les décisions individuelles défavorables), ce décret instaure les règles de création des commissions administratives paritaires par catégories hiérarchiques et non plus par corps. En conséquence, le texte modifie aussi les règles relatives à leur composition, leur organisation et leur fonctionnement. Comme pour les comités sociaux, ces dispositions entreront en vigueur à l’issue des prochaines élections professionnelles.
ACTEURS PUBLICS : ARticle publie le lundi 23 novembre 2020 & BASTIEN SCORDIA
Pourquoi l’efficacité de la réintroduction du jour de carence dans la fonction publique est remise en cause
De nouvelles données diffusées par la direction générale de l’administration et de la fonction publique confirment les effets de la réintroduction, depuis 2018, du jour de carence sur la distribution par durée des absences pour raisons de santé dans la fonction publique d’État. À savoir une réduction du micro-absentéisme, mais aussi une augmentation des absences de longue durée. Des économies sont néanmoins réalisées.
Le poids des mots, la force des données. Après avoir mis en en doute l’efficacité de la réintroduction du jour de carence, la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) vient de publier des données venant conforter ce premier constat. Des données complémentaires à son édition 2020 du “Rapport annuel sur l’état de la fonction publique”.
Dans ce rapport tout juste publié et dont Acteurs publics s’était déjà fait l’écho avant sa publication officielle, la direction générale indique que le rétablissement du jour de carence en 2018 n’a pas entraîné de baisse significative du nombre d’agents absents pour raisons de santé dans la fonction publique d’État. Le micro-absentéisme a certes été réduit, mais les absences de longue durée, elles, ont augmenté. Ce que confirment les données qui viennent d’être mises en ligne, et notamment un graphique relatif à la “distribution par durée des absences pour raisons de santé entre 2010 et 2019”.
Dans la fonction publique d’État, ainsi, les absences d’un jour représentaient 9 % de l’ensemble des absences en 2018 et 2019, contre 13 % en 2017, la dernière année sans jour de carence dans la fonction publique. Une baisse de la proportion des absences de deux et trois jours est également observée depuis 2017.
Augmentation des absences déjà constatée sur la période 2011-2014
À l’inverse, les absences d’une semaine à trois mois sont en hausse. Elles représentaient ainsi 53 % de l’ensemble des absences en 2019 contre 47 % en 2017. Les absences de plus de trois mois sont quant à elles en légère hausse.
À noter que des évolutions du même type sont observées sur la période 2011-2014 [voir notre graphique en bas de l'article], la première période d’introduction du jour de carence dans la fonction publique. Mis en place à la fin de la Présidence Sarkozy, puis supprimé en 2014 par l’équipe Hollande, ce dispositif n’avait “pas significativement modifié la proportion d’agents de la fonction publique d’État absents pour raisons de santé une semaine donnée”, expliquait l’Insee dans une étude de 2017. L’institut y soulignait, déjà, que le nombre d’absences de longue durée avait augmenté malgré une réduction du micro-absentéisme. Un constat que la DGAFP confirme donc aujourd’hui.
Concernant la fonction publique territoriale et l’hospitalière, les résultats montrent que la réintroduction du jour de carence en 2018 “n’a pas eu d’effet ni sur la proportion d’agents absents pour raisons de santé ni sur la durée de ces absences”, explique la DGAFP.
Pas de précisions sur les économies générées
Mais si la réintroduction du jour de carence semble donc avoir eu des effets sur la distribution par durée des absences, cette mesure était surtout d’ordre budgétaire. L’exécutif escomptait en effet pas moins de 270 millions d’euros d’économies annuelles.
Dans son rapport annuel néanmoins, la DGAFP ne fournit pas de données sur les économies générées. “Mais il y en a bien entendu, sachant que les agents ne bénéficient désormais du maintien de leur rémunération qu’à partir du deuxième jour d’arrêt de travail”, y souligne-t-on, en précisant seulement que l’impact du jour de carence sur l’évolution du salaire moyen est estimé à - 0,1 point dans la fonction publique d’État.
acteurs publics : article publie le jeudi 19 novembre 2020