FINANCES ET COMPTABILITÉ / FINANCES LOCALES
La Cour des comptes préconise de réformer en profondeur les finances locales
Un rapport de la Cour des comptes propose de recentrer la fiscalité locale sur le bloc communal et d’accroître son autonomie financière. Une réforme visant à la simplification et à l’équilibre financier, à laquelle les collectivités seraient associées grâce à une autorité indépendante.
Selon la Cour des comptes, il faut envisager une réforme globale de la fiscalité locale, qu’elle juge complexe et à bout de souffle. Dans un rapport, effectué à la demande de la commission des finances du Sénat, la Cour propose de la recentrer sur le bloc communal, d’assurer la solidarité des départements sur les dépenses sociales et de renforcer le financement des régions. « Alors qu’une nouvelle loi de programmation des finances publiques devra tracer une trajectoire des finances publiques incluant les finances locales à partir de 2023, une réflexion sur les évolutions possibles des modalités de financement des collectivités territoriales apparaît nécessaire », peut-on lire dans le rapport. Ses projections intègrent la suppression de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) annoncée par le Gouvernement, avec l’hypothèse d’une compensation par la TVA.
La fiscalité locale serait donc recentrée sur le bloc communal qui verrait son autonomie financière progresser. Les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), transformés en impôt national, lui seraient affectés – en fonction des charges et non plus du lieu des transactions immobilières. Les représentants des départements et de l’Association des Maires de France, voyant dans cette mesure une perte de levier fiscal pour les départements, ont déclaré leur opposition à cette proposition, que la Cour a cependant maintenue.
La réforme prévoit une part de fiscalité nationale partagée plus importante, fondée sur une TVA à 24 % au lieu de 20 %, et incluant le partage d’une fraction de 12 % d’impôt sur les sociétés pour les régions et de 10 % d’impôt sur le revenu pour les départements. Ce partage associerait les collectivités à la dynamique d’impôts nationaux cohérents avec leurs missions, en lissant les évolutions par la diversification du panier de recettes. La fiscalité de l’énergie (TICPE, TCFE) et la taxe sur les certificats d’immatriculation seraient affectées à l’État, pour la politique de soutien à la transition écologique. Quant au fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) et à la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP), trop anciens, ils seraient supprimés.
Les dotations de l’État seraient rationalisées dans un triple objectif : assurer la transition vers le nouveau modèle de financement pour les régions, financer l’action sociale pour les départements et assurer l’équilibre financier du bloc communal.
Et le scénario proposé clarifie les sources principales de financement par niveau de collectivité : des impôts locaux affectés au bloc communal uniquement, complétés par une dotation de fonctionnement et une fraction de TVA ; un panier d’impôts nationaux et une dotation d’action sociale pour les départements ; deux impôts nationaux partagés pour les régions (TVA et impôt sur les sociétés).
La réforme passe aussi par la création d’une autorité indépendante. Objectif : associer les collectivités en amont. Elle serait chargée d’émettre un avis sur les projets de lois relatifs aux collectivités territoriales et de veiller au respect des grands principes : équilibre des finances locales, compensation des transferts de compétences et des suppressions de fiscalité, et réduction des inégalités entre collectivités. À défaut, le comité des finances locales pourrait évoluer vers une instance de concertation. Les intercommunalités pourraient également décider de modalités de répartition des ressources dérogatoires.
Plusieurs années de transition seraient nécessaires pour appliquer la réforme du financement local proposée par la Cour des comptes, avec des simulations dans chaque niveau de collectivités, « pour affiner les critères et lisser les effets dans le temps ».
REDACTION WEKA – Article publié le mercredi 26 octobre 2022 & Marie GASNIER
France Travail : des intercommunalités optimistes… pour le moment
Les associations France urbaine et Alliances Villes emploi attendent du projet France Travail qu’il débouche sur un service public de l’emploi mieux coordonné à l’échelle des bassins de vie. Pour l’heure, les signaux envoyés par le haut-commissaire en charge de la préfiguration du projet, Thibaut Guilluy, restent positifs.
Un mois après le début des concertations sur France Travail destinées à définir le futur service public de l’emploi, le flou autour du projet se dissiperait-il ? Alors que les réunions des divers groupes de travail se sont enchaînées ces dernières semaines, des associations représentant les intercommunalités restent confiantes sur la tournure prise par les discussions. Celles-ci doivent se poursuivre jusqu’en décembre, en attendant les conclusions de la mission de "préfiguration" de France Travail, confiée au haut-commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises, Thibaut Guilluy (lire notre article du 12 septembre 2022).
Une double animation territoriale ?
"On a eu, dans un premier temps, des interrogations sur le rôle d’animateur assigné à Pôle emploi (lire notre article du 3 octobre 2022). Ce point a été précisé", rapporte la conseillère solidarités et cohésion sociale de France urbaine, Marion Tanniou. Se dessineraient des "propositions de gouvernances infra-départementales" où Pôle emploi disposerait certes d’un rôle d’animateur sur des volets techniques, mais en complément d’une "animation territoriale" ouverte aux élus locaux. "La nécessité d’avoir une gouvernance à l’échelle des bassins de vie paraît largement étayée, comme celle de s’appuyer sur les élus locaux", estime Marion Tanniou.
L’association, qui représente les diverses intercommunalités urbaines et a remis ses propositions concernant le futur France Travail, espère que cette réforme sera l’occasion de mettre en place un "coordination renforcée" ou "autorité organisatrice" à l’échelle du bassin de vie. Qu’elle soit structurée sous la forme d’un groupement d’intérêt public, d’une association ou bien adossée à une collectivité ou un EPCI, elle aurait notamment pour vocation, selon France urbaine, à "mettre en cohérence" le maquis complexe des "coordinations" qui existent à l’échelle locale dans le champ de l’emploi : Clefop (conseils locaux emploi, formation et orientations professionnelles, émanant des régions), des Spel (service public de l’emploi local, émanant en principe de l’État], du Spie (service public de l’emploi et de l’insertion)…
France urbaine réclame aussi que cet échelon bénéficie "de financements contractualisés, pluriannuels et fongibles" et définisse l’orientation des demandeurs d’emploi dans une logique de guichet unique.
Une gouvernance territoriale, mais à quelle échelle ?
Reçue par Thibaut Guilluy, l’association Alliance Villes Emploi salue le choix de cette personnalité pour préfigurer France Travail et note des engagements encourageants, notamment le principe de l’adaptation de l’accompagnement en fonction des situations des personnes, qui peuvent être plus ou moins prêtes à reprendre un emploi. "Les élus locaux vont être associés, j’en suis persuadé. Comment et par qui, on ne sait pas encore", nuance toutefois son président, Yohan David.
Moins optimiste que France urbaine, le porte-parole des maisons de l’emploi (MDE) et des plans locaux d’insertion et de l’emploi (Plie) attend encore des garanties à propos de la déclinaison territoriale de France Travail. L’annonce des expérimentations visant les allocataires du RSA à l’échelle départementale, prévue pour démarrer l’an prochain (lire notre article du 10 octobre 2022), ne donne pas encore tout à fait le bon signal. Pour Alliance Villes Emploi, il faudrait y associer les bassins d’emploi sur le plan opérationnel pour déterminer qui fait quoi. "On n’accompagne pas un allocataire du RSA de la même manière et avec les mêmes acteurs dans un quartier X et un quartier Y", avertit-il.
Dans le cadre de France Travail, la tête de réseau des maisons de l’emploi réclame que l’ensemble des élus qui les pilotent soient associés aux prises de décisions qui concerneront leur périmètre, au-delà du seul président d’intercommunalité ou du maire.
LOCALTIS : Article publié le jeudi 03 novembre 2022 & Catherine ABOU EL KHAIR /JP MEDIA