ATTRACTIVITE
L’engagement environnemental, le nouveau critère des jeunes pour choisir leur employeur
Le collectif Pour un réveil écologique a publié un sondage sur le rapport à l’emploi des 18-30 ans, révélant les importantes exigences écologiques des nouvelles générations. Pour attirer et fidéliser les fonctionnaires de demain, les administrations vont devoir s’engager
Quelles sont les attentes des jeunes en matière d’emploi ? Dans le cadre des réflexions qu’il mène sur l’emploi de demain, le collectif Pour un réveil écologique a commandé un sondage sur le rapport au travail des 18-30 ans et sur l’importance qu’ils accordent à l’engagement environnemental de leur employeur ou futur employeur. Celui-ci a été réalisé à partir de plus de 2 000 témoignages de jeunes travaillant ou s'apprêtant à travailler dans le privé comme dans le public, toutes catégories sociales confondues.
“Nous voulions avoir des chiffres concrets sur la manière dont les jeunes se positionnent par rapport à leur activité professionnelle et aux problématiques de transition écologique, afin d’avoir des éléments lors de nos rencontres avec les établissements de formation publics et privés pour qu’ils adaptent leurs plaquettes de formation en conséquence, mais aussi avec les employeurs”, explique Rémi Vanel, ingénieur de formation et spécialiste des problématiques liées à l’emploi au sein du collectif Pour un réveil écologique.
Et la réponse est claire : la majorité des 18-30 ans souhaitent travailler pour un employeur vertueux en matière d’environnement, que ce soit une entreprise ou une administration. Parmi leurs principaux critères, 8 jeunes sur 10 mentionnent le fait que leur emploi soit respectueux de l’environnement et utile à la société. “Nous y voyons également un message politique fort en termes d’engagement de la jeunesse sur ces sujets, et appelons les acteurs publics et économiques à repenser les modes de gouvernance et de décision pour inclure les jeunes et ainsi reconstruire un lien de confiance”, affirme ainsi le collectif.
À l’heure de la crise d’attractivité que traverse la fonction publique, le premier employeur de France, l’État, aurait grand intérêt à prendre en considération les conclusions de ce sondage.
Un critère de décision
“S’ils veulent recruter, les employeurs publics vont devoir parvenir à répondre aux attentes environnementales des jeunes”, soutient Rémi Vanel. Et cela ne concerne pas seulement les administrations et services liés intrinsèquement à l’action environnementale, comme l’Ademe ou le ministère de la Transition écologique : les jeunes sont attentifs à l’engagement des administrations, quels que soient leur secteur d’activité et leurs missions.
Et cela vaut autant pour le choix de l’emploi que pour le fait d’y rester, un jeune sur deux se disant prêt à quitter son job si son employeur ne prend pas suffisamment en compte les enjeux environnementaux. “Les administrations sont en concurrence avec d’autres typologies d’employeurs, et l’un des principaux critères des jeunes pour rester dans leur emploi est celui de l’intégration de la transition écologique et sociale”, confirme Rémi Vanel.
Enquête exclusive : le sens des missions au cœur de la marque employeur de la fonction publique
Certes, les enjeux matériels, comme la rémunération, restent des critères importants pour les jeunes. Mais juste après ces derniers, est évoqué le fait d’avoir un emploi utile à la société et qui respecte l’environnement. “Ce n’est plus seulement une option ou un bonus sur l’emploi, c’est vraiment devenu un critère de décision”, assure le responsable “emploi” de Pour un réveil écologique. Une problématique d’autant plus importante qu’à l’heure de la planification écologique, les administrations ont besoin d’agents compétents en la matière pour parvenir aux objectifs fixés par le gouvernement.
Les collectivités locales mieux perçues
Lorsqu’ils sont interrogés sur les institutions en qui ils ont confiance pour répondre aux enjeux environnementaux, les jeunes citent les climatologues et scientifiques, mais également les acteurs de proximité, comme les collectivités locales. Seuls un peu plus d’un tiers déclarent faire confiance à l’État pour se saisir pleinement du sujet, ce qui revient à 62 % de sceptiques envers l’appareil étatique. “Cela montre que les jeunes n’ont pas forcément confiance dans les grosses structures, considérées comme difficiles à faire évoluer à cause de leurs process particulièrement longs”, analyse Rémi Vanel.
Ainsi, s’ils avaient à trouver une activité professionnelle prenant en compte les enjeux environnementaux, les 18-30 ans auraient plutôt tendance à se tourner vers une petite structure, dont l’action a des conséquences plus directes sur le quotidien des citoyens et qui pourrait davantage prendre en compte leur parole. “Si l’État veut continuer à recruter des gens compétents, il va devoir montrer qu’il est un outil pour faire changer les choses et qu’il n’est pas une grosse machine qui peine à évoluer”, résume Rémi Vanel. D’autant plus qu’en début de carrière, les jeunes ont rarement un poste à responsabilités, chose davantage possible dans une petite structure comme une collectivité locale.
Un enjeu transversal
L’un des principaux obstacles à l’engagement écologique des administrations reste, selon le collectif, celui des moyens financiers. “Au lieu d’ouvrir des postes qui traiteraient pleinement de la transition écologique, on dissémine les missions dans les services pour réduire la masse salariale, et ainsi que le coût de son fonctionnement pèse moins dans les dépenses de l’État”, regrette Rémi Vanel. Des restrictions budgétaires incompatibles avec les enjeux environnementaux, qui demeurent des problématiques de long cours.
De la même manière, former les fonctionnaires à la transition écologique n’aurait qu’un faible impact si, derrière, les moyens ne sont pas déployés pour faire changer les objectifs et les missions des administrations.
Les propositions des agents publics pour “verdir” l’administration
Pour autant, le collectif ne considère pas la création de davantage de postes directement liés à la mise en œuvre de la planification écologique comme la solution absolue. “L’objectif est que la transition écologique devienne la responsabilité de toutes les personnes qui travaillent dans une administration, pas que d’un responsable « Environnement », afin d’en faire un enjeu transversal”, soutient Rémi Vanel. Un des leviers de changement serait alors la formation initiale et continue. “C’est sûr que si l’on impose des missions à des agents qui ne comprennent pas les enjeux, c’est peine perdue. Les membres d’un même service doivent pouvoir parler le même langage”, alerte le représentant du collectif.
ACTEURS PUBLICS : article publie le lundi 16 octobre 2023 & PHILIPPINE RAMOGNINO