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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

MOBILITE

14 Février 2025 , Rédigé par FO Services Publics 51

Le nouveau régime de sanction du pantouflage en partie censuré par le Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel vient de censurer un volet du nouveau régime de sanctions en cas de non-respect des avis de la HATVP sur les projets de mobilités public-privé. La censure concerne l’automaticité de l’interdiction du recrutement dans la fonction publique de contractuels qui ne respecteraient pas ces avis.

Petite victoire pour les “pantouflards”. Par une décision rendue vendredi 24 janvier, le Conseil constitutionnel a censuré une partie des nouvelles règles relatives aux mobilités public-privé, et plus précisément un volet du nouveau régime de sanctions auxquelles s'exposent les agents qui ne respecteraient pas les avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Des dispositions issues de la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019. 

En octobre dernier, les sages s'étaient vu transmettre par le Conseil d'État une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par Yenad Mlaraha, l'ancien conseiller “communication” de Marlène Schiappa lorsque celle-ci était secrétaire d’État à l'Économie sociale et solidaire et à la Vie associative, entre juillet 2022 et juillet 2023. Après cette expérience en cabinet, l'intéressé avait ensuite fondé sa propre société de conseil sans pour autant demander l'avis de la HATVP. 

Pour ce défaut de saisine de la Haute Autorité, Yenad Mlaraha s'était vu refuser un retour en cabinet ministériel début 2024 dans l'équipe de Sarah El Haïry lorsqu'elle était ministre déléguée chargée de l'Enfance, de la Jeunesse et de la Famille. Une décision qu'il avait décidé de contester devant le Conseil d'État.

À l'appui de son recours, il avait déposé une QPC sur les sanctions pouvant être infligées aux agents publics en cas de non-respect des avis de la Haute Autorité sur les projets de mobilité professionnelle entre le secteur privé et le secteur public.

Méconnaissance du principe d’individualisation des peines 

Cette QPC visait précisément l'article L.124-20 du code général de la fonction publique (CGFP), qui prévoit que l'administration “ne peut procéder” au recrutement de l'agent contractuel en cas de non-respect par ce dernier d'un avis de “compatibilité avec réserves” ou d'“incompatibilité” rendu par la HATVP. Et ce pendant trois ans suivant la date de notification de l'avis rendu par la Haute Autorité. Cette interdiction vaut également en cas d'absence de saisine préalable de la HATVP sur un projet de mobilité public-privé. 

Le requérant reproche à ces dispositions “d’instituer une sanction automatique et disproportionnée en fixant à trois ans la durée de l’interdiction, (…) sans que l’administration puisse prendre en compte les circonstances propres à chaque espèce”. À ses yeux, il en résulte ainsi “une méconnaissance des principes de nécessité”, “de proportionnalité” et “d’individualisation des peines”. Une lecture que le Conseil constitutionnel a partagée.

L’interdiction de recrutement en litige “constitue une sanction ayant le caractère d’une punition”, soulignent en effet les sages dans leur décision. “Il résulte des dispositions contestées que cette sanction s’applique automatiquement, sans que l’administration ne la prononce en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce, développent-ils. Dès lors, ces dispositions méconnaissent le principe d’individualisation des peines.” Le Conseil constitutionnel déclare donc contraire à la Constitution l'automaticité de l'interdiction de recrutement comme contractuel en cas de non-respect d'un avis de la HATVP. 

Une nouvelle jurisprudence à prendre en compte en attendant l’abrogation

La censure de l'article de loi correspondant ne prendra pas pour autant effet tout de suite. “L’abrogation immédiate des dispositions déclarées inconstitutionnelles aurait pour effet de supprimer toute possibilité de sanctionner les manquements au contrôle de la HAVTP par l’interdiction de recrutement de l’agent contractuel intéressé”, estiment en effet les sages, pour qui une telle abrogation immédiate entraînerait “des conséquences manifestement excessives”. Pour éviter un vide juridique et laisser éventuellement le temps au législateur de voter un nouveau dispositif de sanctions, le Conseil constitutionnel reporte ainsi au 31 janvier 2026 la date d’abrogation de ces dispositions. 

D'ici là, les sages appellent les juges administratifs à tenir compte de sa nouvelle jurisprudence : “afin de faire cesser l’inconstitutionnalité constatée, il y a lieu de juger que, jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi ou jusqu’à la date de l’abrogation des dispositions déclarées inconstitutionnelles, l’administration peut écarter la sanction prévue par ces dispositions ou en moduler la durée pour tenir compte des circonstances propres à chaque espèce”. Une jurisprudence dont le Conseil d'État devra tenir compte dans le cadre de la reprise de l'examen du recours déposé par Yenad Mlhara contre les délibérations de la HATVP. 

En réaction, Yenad Mlahara s'est félicité de ce que le Conseil constitutionnel ait censuré un régime de sanctions “qui permettait d'imposer des sanctions automatiques et disproportionnées sans prendre en compte les circonstances individuelles ou la bonne foi”. Cette décision, a-t-il ajouté sur Linkedin, “doit maintenant ouvrir un débat essentiel sur la manière de protéger et valoriser l'engagement de celles et ceux qui servent nos institutions, afin de les rendre plus justes, plus transparentes et plus respectueuses des droits de chacun”. 

ACTEURS PUBLICS : article publie le lundi 27 janvier 2025 & Bastien Scordia

 

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