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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

RESSOURCES HUMAINES

13 Juin 2025 , Rédigé par FO Services Publics 51

Contrôle du pantouflage : le régime de sanctions reste à consolider

Difficilement applicable en l’état, le régime de sanctions auquel s’exposent les agents publics en cas de manquement aux règles déontologiques devrait être précisé selon la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Le législateur pourrait être rapidement amené à intervenir sur le sujet.

Le nouveau dispositif de contrôle des mobilités public-privé peut encore être amélioré. C’est la conviction qu’a affiché le nouveau président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), Jean Maïa, le lundi 26 mai, à l’occasion de la présentation du rapport d’activité 2024 de cette autorité administrative indépendante qui est désormais seule en charge du contrôle déontologique des agents publics.

Comme la Cour des comptes il y a quinze jours, il a ainsi plaidé pour un renforcement du contrôle de ces mobilités public-privé via, en particulier, un meilleur suivi des réserves que la Haute Autorité peut émettre sur les projets des agents publics de rejoindre le secteur privé. À ce propos, Jean Maïa souhaite notamment que la HATVP puisse “obtenir toute information utile” au suivi de ses avis auprès de l’actuelle ou ancienne administration de l’agent ainsi que de l’entité rejointe à l’issue de ses fonctions publiques.

Le haut-fonctionnaire a aussi profité de la présentation de ce rapport pour revenir sur la question sensible du régime de sanctions applicable aux agents publics en cas de manquement aux règles déontologiques. Un régime qui pourrait avoir vocation à être précisé, selon Jean Maïa.

Des sanctions difficilement applicables

Sur ce point, le nouveau président de la Haute autorité rejoint son prédécesseur, Didier Migaud. Lorsqu’il était à la tête de la HATVP, celui qui fut ensuite brièvement ministre de la Justice avait en effet pointé plusieurs difficultés s’agissant de ce régime de sanctions applicable aux agents publics. Et ce, précisément en cas de non-respect des avis de compatibilité avec réserves et d’incompatibilité de la Haute Autorité, mais aussi en cas de défaut de saisine de l’autorité hiérarchique préalablement à l’exercice d’une activité dans le privé.

Pour rappel, plusieurs sanctions sont prévues pour de tels manquements. L’agent public concerné peut notamment faire l’objet de poursuites disciplinaires. S’il s’agit d’un fonctionnaire retraité, il peut faire l’objet d’une retenue sur pension (dans la limite de 20 % du montant de cette pension, pendant les trois ans suivant la cessation de ses fonctions). Il peut aussi peut être mis fin au contrat dont est titulaire l’agent contractuel à la date de notification de l’avis de la haute autorité. Et ce, sans préavis ni indemnité de rupture.

Reste que, selon la HATVP, ce régime de sanctions est lacunaire. La Haute Autorité relève notamment une difficulté d’application de ces sanctions. En l’état du droit, les sanctions ne semblent pouvoir être prononcées qu’en cas de méconnaissance de l’avis de la HATVP et non lorsque et avis émane de l’autorité hiérarchique. Un dispositif qui, selon la Haute Autorité, est contraire à l’objectif poursuivi par la réforme de 2019 qui a largement internalisé le contrôle des mobilités au sein des administrations. Ces dernières seraient donc “très limitées dans leurs moyens d’actions en cas de méconnaissance de leurs avis”, expliquait déjà la Haute Autorité dans son rapport d’activité 2023. Un constat qu’a partagé la Cour des comptes dans son rapport du 14 mai sur les mobilités public-privé où elle relevait des sanctions “très rares” en raison, donc, notamment, de leurs difficultés d’application.

Intervention prochaine du législateur ?

Le Conseil constitutionnel est néanmoins intervenu sur ce régime des sanctions en censurant, en janvier dernier, l’automaticité de l’interdiction du recrutement dans la fonction publique de contractuels qui ne respecteraient pas les avis de la HATVP. Pour les sages, cette interdiction constituait en effet une sanction ayant le caractère de punition et présentait un caractère automatique, privant l’administration de la possibilité de prendre en compte les circonstances de l’espèce. Ce qui, selon les juges constitutionnels, méconnaissait donc le principe d’individualisation des peines.

La censure de l’article de loi correspondant ne prendra pas pour autant effet tout de suite. “L’abrogation immédiate des dispositions déclarées inconstitutionnelles aurait pour effet de supprimer toute possibilité de sanctionner les manquements au contrôle de la HAVTP par l’interdiction de recrutement de l’agent contractuel intéressé”, estimaient les sages, pour qui une telle abrogation immédiate entraînerait “des conséquences manifestement excessives”.

Pour éviter un vide juridique et laisser éventuellement le temps au législateur de voter un nouveau dispositif de sanctions, le Conseil constitutionnel a ainsi reporté au 31 janvier 2026 la date d’abrogation de ces dispositions. “Il reviendra au législateur d’intervenir sur ce sujet, ce qui pourrait être l’occasion d’appréhender le régime de sanctions dans sa globalité”, explique Jean Maïa, qui était secrétaire général du Conseil constitutionnel au moment de cette censure.

D’ici à une éventuelle intervention du législateur, les sages appellent les juges administratifs à tenir compte de sa nouvelle jurisprudence : “Afin de faire cesser l’inconstitutionnalité constatée, il y a lieu de juger que, jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi ou jusqu’à la date de l’abrogation des dispositions déclarées inconstitutionnelles, l’administration peut écarter la sanction prévue par ces dispositions ou en moduler la durée pour tenir compte des circonstances propres à chaque espèce.”

ACTEURS PUBLICS : Article publié le mardi 27 mai 2025 & Bastien SCORDIA  

 

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