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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

COLLECTIVITES TERRITORIALES

27 Juillet 2023 , Rédigé par FO Services Publics 51

Alain Lambert : “Il faut rétablir une saine pratique de consultation des élus locaux”

Dans ce billet, le président du Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) s’inquiète d’une augmentation “préoccupante” des saisines d’urgence et d’extrême urgence par le gouvernement sur les textes intéressant les collectivités. “L’examen rapide des textes ne favorise pas la qualité du droit et cristallise les relations État-collectivités”, regrette l’ancien ministre. 

Depuis le début de l’année 2023, le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) déplore le recours trop fréquent aux procédures d’urgence et d’extrême urgence. Comme le rappelait déjà le rapport d’activité pour les années 2019 à 2022, près de 23 % des projets de texte examinés en séance l’étaient à la suite d’une procédure exceptionnelle, soit 89 projets de texte pour la seule année 2022. Au demeurant, il convient de rappeler que 7 séances ad hoc ont dû être organisées à la suite d’une saisine en procédure exceptionnelle. Depuis janvier 2023, force est de constater que cette tendance inquiétante tend à se poursuivre avec l’examen de 13 projets de texte en procédure exceptionnelle et l’organisation de 4 séances ad hoc, dont 2 au mois de mai et une au mois de juin.

Prévue par l’article L. 1212-2 (VI) du code général des collectivités territoriales (CGCT), la procédure d’urgence est un mode de saisine exceptionnelle du CNEN sur décision du Premier ministre. Ce mode de saisine permet ainsi de réduire le délai d’examen par le CNEN à 15 jours au lieu des six semaines de droit commun.

La procédure d’extrême urgence réduit, quant à elle, le délai d’examen à 72 heures, ce qui oblige régulièrement le CNEN à organiser des séances exceptionnelles à ce titre. Dans un pareil cas, il est impossible pour le Conseil de procéder à une seconde délibération. Cela est d’autant plus regrettable lorsque les membres du CNEN constatent que les projets de texte présentés selon une procédure exceptionnelle sont publiés plusieurs mois après la saisine de l’instance !

Le 25 mai dernier, le CNEN s’est réuni afin de délibérer sur le projet de loi relatif au plein emploi. Le collège des élus, convoqué en urgence, a émis un avis défavorable. Ces conditions de saisine, d’autant plus sur un projet de loi, ne sont pas de nature à permettre l’examen toujours éclairé des projets de texte concernés, notamment pour ceux n’ayant pas fait l’objet d’une concertation préalable avec les élus locaux et leurs associations nationales représentatives.

La dégradation manifeste de la qualité des études et fiches d’impact transmises au CNEN révèle un calendrier législatif et réglementaire trop contraignant.

Aussi, il convient de rappeler que le Conseil d’État préconise de mener avec diligence les concertations avec les destinataires de la norme avant que le CNEN ne soit saisi. Au terme d’une jurisprudence constante, il rappelle que “la décision de saisir une commission administrative à caractère consultatif telle que le CNEN doit intervenir dans des conditions qui ne dénaturent pas l’obligation de consulter”.

En ce sens, le Conseil rappelle régulièrement que les saisines en urgence et en extrême urgence ne doivent pas se substituer aux saisines ordinaires. L’examen rapide des textes soumis à notre institution ne favorise pas la qualité du droit et cristallise les relations État-collectivités territoriales. La dégradation manifeste de la qualité des études et fiches d’impact transmises au CNEN révèle un calendrier législatif et réglementaire trop contraignant qui pousse les ministères porteurs à produire de la norme dans l’urgence et sans consultation des parties prenantes.

Le peu d’égard des ministères porteurs envers les élus locaux participe à l’augmentation des saisines en procédure exceptionnelle, la consultation du CNEN devenant peu à peu une formalité alors qu’elle a vocation à simplifier la norme et donc la mise en œuvre des politiques publiques au niveau local.

Les ministères prescripteurs doivent tenir compte, dans le cadre de l’élaboration de la norme, du temps nécessaire à la concertation des associations nationales représentatives des élus locaux et de la régulière consultation du CNEN dans le respect du délai de droit commun de six semaines. C’est la condition pour que l’obligation de consulter soit considérée comme respectée.

ACTEURS PUBLICS : article publie le mardi 11 juillet 2023 & ALAIN LAMBERT

 

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