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Syndicat Force Ouvrière des Services Publics de la Marne

COLLECTIVITES

5 Novembre 2024 , Rédigé par FO Services Publics 51

Comment le gouvernement veut contraindre les élus locaux à faire des économies

L’exécutif demande un effort de 5 milliards d’euros d’économies aux collectivités territoriales en 2025. Pour y parvenir, il est prévu de mettre en place un nouveau mécanisme contraignant consistant en des prélèvements sur les recettes des plus grandes collectivités. Les associations d’élus dénoncent des “perspectives inacceptables”. La restauration de bonnes relations État-collectivités espérée par le gouvernement Barnier a déjà du plomb dans l’aile.

Le Premier ministre, Michel Barnier, avait prévenu les élus locaux lors de sa déclaration de politique générale, le 1er octobre : “chacun doit prendre sa part à l'effort collectif” de redressement des comptes publics. La sentence est finalement tombée, mardi 8 octobre, à l'occasion d'une réunion du Comité des finances locales (CFL) au cours de laquelle le gouvernement a annoncé vouloir demander un effort de 5 milliards d'euros d'économies aux collectivités locales.

De quoi déjà raviver les tensions avec les associations d'élus locaux qui, pourtant, avaient nourri beaucoup d'espoirs dans la nomination de Michel Barnier avec son profil girondin et décentralisateur, mais aussi dans la constitution d'un grand ministère des Territoires piloté par Catherine Vautrin.

Catherine Vautrin promet un “nouveau chapitre” des relations État-collectivités

Selon les associations d'élus, ces premiers signaux de la part de l'exécutif auraient pu augurer une amélioration des relations entre l'État et les collectivités. Mais l’annonce de ces premiers éléments du budget 2025 vient aujourd'hui rappeler le souvenir du début du premier quinquennat Macron et des nombreuses tensions ayant jalonné la mise en place des “contrats de Cahors”. Ces contrats, visant à limiter la hausse des dépenses des collectivités, avaient été suspendus à la survenue de la crise sanitaire en 2020 et n'avaient pas été remis en place depuis lors.

Prélèvement sur les recettes

Cette fois-ci, le gouvernement Barnier ne compte pas agir à proprement parler sur les dépenses des collectivités, mais sur leurs recettes. La restriction de ces recettes pourrait néanmoins les pousser à réduire leurs dépenses, espère l'exécutif, comme ce fut le cas après la baisse de la dotation globale de fonctionnement (DGF) décidée par l'ancien chef de l’État François Hollande.

Le principal dispositif retenu par le gouvernement Barnier est à nouveau un mécanisme contraignant, consistant en la création d'un fonds d'épargne imposé aux plus grandes collectivités, soit 450 collectivités environ. À noter qu'une vingtaine de départements à la situation sensible seront exemptés de cet effort, notamment la Seine-Saint-Denis ou certains territoires d’outre-mer.

Dans le détail, ce “mécanisme de précaution” devrait conduire à la mise en réserve de quelque 3 milliards d'euros en 2025, l'objectif à terme étant de renforcer les mécanismes de péréquation entre les collectivités. Cette épargne mise de côté sera restituée ultérieurement, promet l'exécutif, sans préciser pour le moment les modalités de mise en place du fonds. Des détails devraient être apportés ce jeudi 10 octobre, à l'occasion de la présentation du projet de loi de finances pour 2025.

Une addition supérieure à 5 milliards d’euros

L’exécutif a prévu 2 autres mécanismes pour atteindre les 5 milliards d'euros d'économies dans la sphère locale. À savoir un gel des recettes de TVA affectées aux collectivités (pour une économie de 1,2 milliard d'euros) et une réduction de 800 millions d'euros du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).

Pour les élus locaux, néanmoins, l'effort demandé sera bien supérieur aux 5 milliards d'euros annoncés par le gouvernement Barnier. L'addition, critique le vice-président délégué de l'Association des maires de France (AMF), André Laignel, sera “plutôt de 9,5 milliards d'euros”, si l’on y ajoute la baisse prévue d’1,5 milliard d'euros du Fonds vert et les effets de l'inflation.

Les maires renvoient l’État à ses responsabilités dans la dégradation des finances publiques

Celui qui préside aussi le Comité des finances locales en a profité pour dénoncer une “ponction sans précédent sur une seule année”. “Nous n'acceptons aucune des mesures d'économies annoncées par le gouvernement Barnier, a-t-il fulminé. Il est inutile qu'on veuille nous faire des discours sympathiques sur la confiance à retrouver alors que les actes immédiats sont, à l'inverse, la parole bafouée.”

“Le gouvernement se trompe, ajoute le maire UDI de Sceaux, Philippe Laurent, également vice-président de l'AMF. Il pénalise les acteurs des services publics du quotidien les plus efficaces et, ce faisant, il pénalise tous les Français et d'abord les plus fragiles en ralentissant également la transition écologique. Les maires ne peuvent pas l'accepter.” De quoi prévoir des échanges tendus entre l'AMF et l'exécutif à l'occasion du traditionnel congrès des maires, qui se tiendra dans un mois.

Impact d’1 milliard d’euros pour les régions

Les autres associations d'élus n'ont pas manqué de mots non plus pour critiquer les annonces du gouvernement Barnier. Villes de France dénonce ainsi des “perspectives inacceptables”, ciblant particulièrement le prélèvement à venir de 3 milliards d'euros sur les recettes des 450 collectivités les plus importantes. “Concrètement, cela signifie que des recettes votées ou attendues ne seront pas versées, estime l'association. Il est insupportable que le gouvernement considère que gros égale riche”.

L'Association des petites villes de France (APVF) appelle de son côté l'exécutif “à ne pas sacrifier l'avenir”. “S'il est absolument nécessaire de redresser les comptes de la nation, les efforts ne doivent pas se faire au prix de l'investissement des collectivités”, estime l’APVF, qui explique que certes, le mécanisme contraignant prévu pour les plus grandes collectivités n'affectera “que peu les petites villes”, mais que le “fonds de précaution” imaginé par l'exécutif “les impactera directement, (…) dans un effet boule de neige, (…) en frappant leurs partenaires naturels que sont les départements et les intercommunalités”.

Régions de France, pour sa part, juge que les régions seront le niveau de collectivité “le plus impacté” par le projet de loi de finances pour 2025. L'association présidée par Carole Delga estime ainsi à 1 milliard d'euros environ l'impact direct des décisions du gouvernement sur les recettes de ces collectivités, notamment en matière de TVA. “Cette baisse historique constituera une mise en péril des politiques régionales et de l'investissement public”, ajoute Régions de France. “Les régions ne peuvent être la solution à un État trop dépensier et inefficace”, conclut sa présidente, pour qui “la solution réside dans une profonde réforme de l'Etat ”et dans un “nouvel acte de décentralisation”. Le bras de fer État-collectivités reprend de plus belle.

ACTEURS PUBLICS : article publie le mercredi 09 octobre 2024 & Bastien Scordia

 

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